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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/257

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LA LUXURE DE GRENADE

tion et l’austérité en temps de paix et étaient invincibles dans le combat parce qu’ils aspiraient à la mort. Hamet el Zegri faisait lui-même partie de cet ordre. Il était nu-tête, d’une étrange maigreur et il paraissait à cheval d’une taille démesurée.

Il harangua la foule silencieuse devant le port.

Il promit une victoire rapide. Les approvisionnements étaient grands et permettaient d’attendre. El Zagal, qui s’était proclamé roi du royaume de Grenade à la mort d’Abul Hacen, venait de partir d’Almeria avec une armée pour secourir Malaga. Hamet el Zegri savait d’autre part, de source sûre, que le sultan d’Égypte d’accord avec le Grand Seigneur de Constantinople envoyait une flotte immense pour venger les offenses faites au Croissant par les Espagnols. La mer et la terre allaient être, autour de Malaga, le tombeau des armées ennemies.

Ces paroles, la vue des troupes et la foi qui animait leur chef rassurèrent les habitants. Les acclamations qui s’élevaient, quelques instants auparavant, pour le pacifique Ali Dordux, retentirent pour Hamet el Zegri, le guerrier.

La journée passa dans une effervescence glorieuse. On commença à organiser les milices par quartiers. Il n’était question que des prédictions d’un derviche nécromancien nommé Massar, qui venait de Grenade et avait reçu d’Allah le don de déchiffrer l’avenir dans une écaille de tortue. Il avait vu, avec une extrême netteté, l’image du roi Ferdinand portant sur la nuque une plaie béante. Et il y avait des gens, dans les carrefours, qui faisaient la description de cette plaie.