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LA LUXURE DE GRENADE

Enchaînées au même licou comme des ânesses ! Personne ne pourra discuter qu’elles sont à moi. Je les vendrai le prix que je voudrai. Tenez, touchez comme elles ont la peau douce !

Il déchira la chemisette en gaze de soie de la première et il la poussa brutalement en avant afin que ses compagnons puissent palper le jeune corps.

Mais il roula à quatre pas, le ventre ouvert. L’homme à la grande épée qui se retournait pour voir les jeunes filles, reçut un coup de poignard dans l’œil droit qui le fit s’affaler sur le sol.

Almazan avait jailli de l’ombre et il frappait comme un furieux. Ce qu’il venait de voir lui avait ôté toute prudence et toute raison. Des imprécations retentirent. Des épées sifflèrent autour de lui. Il porta d’autres coups et il s’élança au hasard en avant.

Il gravit une rue, il en descendit une autre. La force qui l’animait le faisait frapper et passer. À travers les ténèbres, un hurlement de rage le suivait. Il apercevait de tous côtés des visages qui, tous, exprimaient le même appétit bestial de luxure, des bras ouverts pour saisir des formes de femmes. Il songeait confusément :

— Al Nefs ! le démon luxurieux qui m’a perdu ! C’est lui qui se répand, qui se déchaîne, avec des ailes, des bouches, des tentacules, une vie multiple, monstrueuse, infinie.

Il luttait contre Al Nefs. Une étrange puissance le rendait léger, ailé, invincible.

Des appels désespérés partaient d’une maison. Il y pénétra, sauta par-dessus des cadavres et vit, à la clarté d’une lampe de bronze, un homme accroupi