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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/296

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LA LUXURE DE GRENADE

subir le troisième supplice de la question et vous parlerez au milieu des souffrances, sans avoir le mérite de vos aveux.

Le troisième supplice ! Almazan savait que le Conseil de la Suprême Audience avait, sur les instances du pape, décidé que la question ne pourrait être donnée qu’une seule fois. Les supplices variaient en cruauté. Mais le troisième, celui du feu, était bien plus terrible que celui de la corde, ou celui de l’eau, que l’on donnait d’ordinaire. Et toute sa force s’évanouit.

Oui, comme le lui disait la voix étouffée, il ferait mieux de parler de son plein gré. Parler ? Qu’avait-il à dire ? Il ignorait où pouvait être Christian Rosenkreutz en ce moment. Donner des noms ? Les Espagnols auraient demain, sans doute, pris Grenade. On brûlerait comme hérétiques dangereux quelques inoffensifs savants, quelques sages désintéressés et voués au culte de l’esprit.

Il secoua imperceptiblement la tête.

Il dut y avoir un geste derrière lui, car le bourreau lui cligna de l’œil et le visage triste et fidèle de l’Inquisiteur se remplit d’une expression désolée.

Rapidement, un aide tira de derrière un pilier un brasero qu’il poussa vers l’extrémité du chevalet d’où dépassaient les pieds d’Almazan. Un autre le déchaussa. Un troisième s’approcha tenant un pot plein d’huile dont, avec un long pinceau, il l’enduisit jusqu’aux mollets.

— Une dernière fois, dit la voix comme un soupir.

Almazan ferma les yeux.

Il les rouvrit une seconde après et ses prunelles