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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/85

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LA LUXURE DE GRENADE

dormir très longtemps à cause de cette jeunesse que le repos donne aux traits.

Almazan descendit jusqu’au Darro, il le longea un peu et il aperçut Christian Rosenkreutz qui l’attendait. Tous deux s’enfoncèrent dans les rues étroites de l’Albaycin.

— Je t’amène dans la maison d’Al Birouni, dit Rosenkreutz. C’est un sage et c’est surtout un savant. Ne t’étonne pas de ses bizarreries ou de celles des autres hommes qui seront là. Il y a de grandes différences entre les races. La foi religieuse mène souvent au fanatisme. Et c’est un effet singulier de la sagesse de ne pénétrer dans les esprits qu’en en troublant l’équilibre et en y apportant une part d’erreur. Mais tu verras tous les Rose-Croix présents en ce moment à Grenade.

Le soleil venait de disparaître derrière les montagnes de Loja et du haut des mosquées rayonnantes, la nuit s’était précipitée brusquement sur la ville dans une cavalcade d’ombres. Il y avait encore, à des carrefours, des enfants qui jouaient dans la poussière et parfois, à cause de l’étroitesse des rues, les deux hommes s’effaçaient pour laisser passer un mulet avec son conducteur silencieux.

Mais Almazan, habitué à la vie nocturne de Séville, où fourmillaient les espions du Saint Office, se retournait de temps en temps et il ne tarda pas à s’apercevoir que quelqu’un les suivait.

Il le fit remarquer à Christian Rosenkreutz qui se mit à rire.

— Nous ne sommes heureusement, répondit-il, ni en Castille ni en Andalousie. La police a gardé son