Aller au contenu

Page:Malinowski - Mœurs et coutumes des Mélanésiens, trad. Jankélévitch, 1933.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

clan du même nom, était un Lukuba. La plupart des héros mythiques ayant joué un rôle dans les relations inter-tribales et dans les formes cérémonielles du commerce appartenaient au même clan[1]. La plus grande partie de la magie économique de la tribu était également la propriété de ce clan. À Vakuta, où ils ont été récemment supplantés, sinon déplacés, par les Tabalu, ils n’en continuent pas moins à exercer un certain ascendant ; ils détiennent toujours le monopole de la magie et, s’appuyant sur la tradition mythologique, les Lukuba affirment toujours leur supériorité sur les usurpateurs. Il existe chez eux beaucoup moins de sous-clans de bas rang que chez les Malasi.

Il n’y a pas grand’chose à dire touchant la mythologie et le rôle culturel et historique des Lukwasisiga, qui représentent la troisième grande division totémique. Le principal mythe relatif à l’émergence la laisse complètement de côté ou n’assigne aux animaux et personnages ancestraux des membres de cette tribu qu’un rôle tout à fait insignifiant. Ils ne possèdent aucune magie plus ou moins importante et ne sont l’objet d’aucune référence mythologique. Ils ne jouent un rôle tant soit peu important que dans le grand cycle Tudava qui rattache l’ogre Dokonikan au totem Lukwasisiga. À ce clan appartient le chef du village Kabwaku qui est en même temps le chef du district Tilataula. Ce district a toujours vécu en état d’hostilité latente avec le district Kiriwina proprement dit et les chefs de Tilataula étaient les rivaux politiques des Tabalu, gens du rang le plus élevé. De temps à autre, les deux districts se faisaient la guerre. Quel que fût le parti défait et obligé de fuir, la paix était toujours rétablie par une cérémonie de réconciliation, et la situation respective des deux provinces se trouvait ramenée à ce qu’elle était avant la guerre. Les chefs d’Omarakana étaient jaloux de la supériorité de leur rang et exerçaient une sorte de contrôle général sur la province hostile, même après une guerre dont celle-ci était sortie victorieuse. Les chefs de Kabwaku étaient, jusqu’à un certain point, obligés de se soumettre à leurs ordres ; c’est ainsi, par exemple, que jadis, lorsque devait avoir lieu une exécution capitale, le chef d’Omarakana chargeait toujours

  1. Cf. Argonauts of the Western Pacific, p. 321.