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Page:Malinowski - Mœurs et coutumes des Mélanésiens, trad. Jankélévitch, 1933.djvu/129

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son ennemi potentiel de s’en acquitter. La supériorité réelle des chefs d’Omarakana était due à leur rang. Mais leur puissance et la crainte qu’ils inspiraient à tous les autres indigènes tenaient surtout au fait qu’ils détenaient l’importante magie du soleil et de la pluie. C’est ainsi que les membres d’un sous-clan du clan Lukwasisiga étaient les ennemis potentiels et les vassaux dociles des chefs du rang le plus élevé, mais dans la guerre ils étaient leurs égaux. Si en effet en temps de paix la suprématie des Tabalu était au-dessus de toute contestation, les Toliwaga, de Kabwaku, étaient considérés comme des guerriers intrépides et redoutables. D’une façon générale, les Lukwasisiga étaient considérés comme des rustauds (Kulita’odila). Un ou deux sous-clans de ce clan étaient d’un rang plus élevé et épousaient fréquemment des membres du clan Tabalu, d’Omarakana.

Le quatrième clan, celui des Lukulabuta, ne comprend que des sous-clans de bas rang. C’est le clan le moins nombreux et la seule magie qu’il possède se rattache à la sorcellerie.

En abordant l’interprétation historique de ces mythes, nous nous trouvons en présence, dès le début, d’une question fondamentale : devons-nous voir dans les sous-clans qui figurent dans les légendes et les mythes de simples ramifications locales d’une culture homogène, ou devons-nous leur attribuer une signification plus ambitieuse et les considérer comme des représentants de cultures différentes, c’est-à-dire comme autant d’unités déposées par différentes vagues de migration ? Si l’on admet la première de ces deux possibilités, les mythes, les données historiques et les faits sociologiques doivent être considérés comme se rapportant simplement à des mouvements et changements internes, sans grande importance, et il ne nous reste rien à ajouter à ce que nous avons déjà dit.

On peut cependant dire, à l’appui de l’autre hypothèse, que la principale légende relative à l’émergence situe les origines des quatre clans dans un endroit très suggestif. Laba’i est situé sur la rive nord-ouest, seul endroit accessible aux marins venant de la direction où règnent les moussons. En outre, les courants des migrations, l’expansion des influences culturelles et les voyages des héros civilisateurs s’effectuent toujours, d’après