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Page:Malinowski - Mœurs et coutumes des Mélanésiens, trad. Jankélévitch, 1933.djvu/34

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vaille pour sa sœur et compte à son tour sur le travail du frère de sa femme, et qu’on dépense plus de temps et d’énergie à étaler, à montrer, à déplacer les marchandises qu’à faire œuvre vraiment efficace ? Mais une analyse plus serrée montre que quelques-unes de ces actions apparemment inutiles constituent des stimulants économiques puissants, que d’autres impliquent une force de cohésion légale et que d’autres encore sont le résultat direct des idées que les indigènes se font sur la parenté. Il est également évident que, pour bien comprendre l’aspect légal de ces rapports, il faut les envisager en bloc, sans attribuer, dans la chaîne des devoirs réciproques, plus de valeur et d’importance à tels ou tels de ses anneaux qu’à d’autres.

VIII

Le principe du do ut des joue un rôle dominant dans la vie tribale

Nous avons donné, dans ce qui précède, une série de tableaux de la vie indigène, destinés à illustrer l’aspect juridique des relations matrimoniales, de la coopération au sein d’une équipe de pêcheurs, des échanges entre villages de l’intérieur et villages de la côte, de certaines obligations cérémonielles en rapport avec le deuil. Nous avons cité ces exemples avec quelques détails, de façon à bien faire ressortir le fonctionnement concret de ce que nous considérons comme le mécanisme réel de la loi, de la contrainte sociale et psychologique, des forces, mobiles et raisons réels qui poussent l’homme à s’acquitter de ses obligations. Si nous disposions d’assez de place, il nous serait facile de réunir tous ces exemples isolés en une vaste fresque et de montrer que le même mécanisme juridique se retrouve dans toutes les relations sociales, dans tous les domaines de la vie tribale, et que du fait de ce mécanisme les obligations impérieuses forment une catégorie à part et se distinguent de toutes les règles coutumières.

Prenons d’abord les transactions économiques : l’échange de