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ÉLÉVATION DU POUVOIR FRANÇAIS DANS L’INDE

lement sous les ordres du Gouverneur et du Conseil supérieur de Pondichéry et par conséquent irresponsable ; mais obligé chaque jour et presque à chaque heure, d’agir d’après ses propres inspirations, Dupleix, il n’y a pas lieu de s’en étonner, avait dîi quelquefois se trouver en opposition avec les vues de son supérieur imméiliat. La promptitude même des actes de Dupleix devait les faire paraître irréfléchis et précipités aux yeux d’hommes habituellement calmes et prudents. Plusieurs divergences d’opinion s’étaient récemment manifestées entre lui et Dumas. Celui-ci, voulant mettre un frein à des prétentions qu’il ne trouvait ni justes ni autorisées, avait chargé l’un des conseillers, M. Godeheu, qui retournait en Europe, d’expliquer, mieux qu’il ne pouvait le faire par écrit, l’état exact des affaires ; mais les Directeurs de Paris entrèrent complètement dans les vues de leur agent de Chandernagor, dont le génie entreprenant et pratique leur avait été si profitable, et lors de la démission de Dumas, ils nommèrent, sans hésiter, Dupleix au poste de Gouverneur général de Pondichéry. Il y fut installé au mois d’octobre 1741.

Dupleix avait trouvé Chandernagor en ruines, et lorsqu’il quitta cette ville, elle était devenue, par l’étendue de son commerce, par son crédit sans égal, par le nombre et l’importance de ses constructions, le premier établissement européen au Bengale. Lui-même s’était personnellement acquis par le commerce une immense fortune, ce qui était non-seulement permis, mais encouragé par les Directeurs. Au commencement de l’année où il fut nommé à Pondichéry, Dupleix avait épousé la veuve d’un conseiller. Mme Vincent[1], femme née et élevée dans l’Inde, mais que sa nature forte et dévouée, et sa brillante intelligence rendirent une compagne accomplie pour ce politique perspicace et ce génie fertile et profond. Sa connaissance des divers dialectes était sans prix pour Dupleix dans ses rapports confidentiels avec les princes indigènes ; elle joignait d’ailleurs à cette instruction, une compréhension prompte, un zèle dévoué, qualités dont l’ensemble était inestimable.

En prenant le gouvernement de Pondichéry, Dupleix trouva cet

  1. Elle était fille d’un Français nomme M. Albert. Sa mère appartenait à la famille portugaise de Castro.