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ÉLÉVATION DU POUVOIR FRANÇAIS DANS L’INDE

anglaise longeait la côte ; elle avait reçu des renforts et les vaisseaux dont elle se composait pouvaient, par leurs continuelles croisières, intercepter et détruire les navires de commerce français. La Compagnie des Indes, même avant la rupture de la paix, avait cessé d’envoyer des vaisseaux à Pondichéry, de sorte que Dupleix n’avait plus de nouvelles que par des arrivages irréguliers. Le prestige de la France avait reçu une rude atteinte à Pondichéry et dans les pays environnants. On savait partout, que sans l’intervention du nabab, Dupleix aurait été forcé de se soumettre aux Anglais, et, ainsi qu’il arrive en pareil cas, les sycophantes et les adulateurs du succès, comme il s’en trouve en tous pays, se hâtèrent de s’éloigner de lui. Cependant, au milieu de l’incertitude et du découragement qui l’entouraient, il conservait toute sa résolution, et, quoique son cœur fût rempli d’anxiété, son attitude ne perdait rien de son calme ni de sa dignité. Ce fut néanmoins avec un grand soulagement qu’il apprit de bonne source, au mois de mai 1746, qu’on avait à Mahé des nouvelles de l’escadre de La Bourdonnais, cette escadre tant désirée et qu’il n’espérait plus voir.

Nous avons présenté Mahé de La Bourdonnais à nos lecteurs comme l’officier habile et entreprenant qui avait réussi à s’emparer, en 1725, de la ville à laquelle il donna son nom. Nous allons donner un rapide aperçu des dix-neuf années qui se sont écoulées depuis ce brillant début dans les Indes. Réduit à l’inactivité par la paix à laquelle la France paraissait alors disposée, La Bourdonnais, après la prise de Mahi, équipa un navire pour son propre compte et trafiqua pendant trois ou quatre ans dans les mers d’Arabie. L’ascendant qu’il acquit en peu de temps sur tous ceux avec lesquels il se trouva en rapport et qui se manifesta surtout à l’occasion d’un conflit survenu entre des marins portugais et des Arabes, conflit qu’il réussit à apaiser, lui valut l’estime du gouverneur de Goa, et détermina ce vice-roi à lui offrir le commandement d’un vaisseau de guerre au service du roi de Portugal ; à cet emploi étaient attachés certains ordres ou titres. La Bourdonnais ayant accepté l’offre, fit une expédition à Mozambique et plusieurs croisières dans les mers des Indes. Mais il n’est jamais sans inconvénient de servir une puissance étrangère ; au bout de deux ans, La Bourdonnais