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ÉLÉVATION DU POUVOIR FRANÇAIS DANS L’INDE

et on se livra à la culture de tout ce qui était propre à l’exportation. Les navires qui relâchaient dans l’île Bourbon firent en France des récits si brillants de sa prospérité que, vers la fin du dix-septième siècle, ou le commencement du dix-huitième, la Compagnie admit la requête présentée par les habitants pour en être déclarés possesseurs, et y envoya cinq ou six familles avec un Gouverneur[1]. Ce Gouverneur fut d’abord bien reçu, mais les descendants des pirates ou des déserteurs trouvèrent bientôt son autorité incommode ; ils se saisirent de lui et l’emprisonnèrent dans un donjon où il demeura jusqu’à sa mort. Leur révolte n’eut pas d’autre résultat. Un nouveau Gouverneur fut envoyé avec l’ordre, qu’il exécuta ponctuellement, d’ériger un fort pour sa sûreté et de punir les fauteurs de troubles.

En 1717, la population de l’île s’élevait à deux mille neuf cents hommes libres et à onze cents esclaves ; l’année suivante fut marquée par un événement qui donna une nouvelle impulsion à son commerce et assura sa prospérité future. Nous voulons parler de l’introduction de la culture du café, qui fut dès lors la principale production de l’île. Dès 1715, on avait pris possession de l’île déserte appelée Île de France, mais aucune tentative sérieuse de colonisation n’eut lieu avant 1721. Un édit daté de novembre décréta la formation d’un Conseil provincial dépendant de celui de Bourbon, et en 1723, Dumas fut nommé gouverneur des deux îles. De grands avantages furent alors offerts aux habitants de Bourbon pour les déterminer à émigrer vers la plus grande des deux îles. Dans ce but, des terrains étaient concédés aux colons et la Compagnie faisait à chacun d’eux une avance de fonds proportionnée à l’importance de la concession. Néanmoins, pendant assez longtemps, ces efforts ne semblèrent pas devoir réussir. Douze ans après, les colons n’avaient pu encore rembourser les avances qu’on leur avait faites. Mais au moment où l’on hésitait sur la ligne de conduite à adopter pour l’avenir, La Bourdonnais apparut en France. Sa réputation de talent, d’énergie et de résolution l’avait précédé, et les Directeurs

  1. Il paraîtrait cependant, d’après le calendrier des îles de France et de Bourbon, que les habitants avaient eu une suite régulière de Gouverneurs pris dans leur sein depuis le début de la colonie. Ainsi, on rapporte qu’en 1675 le P. Hyacinthe, un capucin, y arriva en qualité de curé, et exerça l’autorité de Gouverneur.