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NÉGLIGENCE DU GOUVERNEUR MORSE

se préparait ; quoique intimement convaincu de la sagesse de cette mesure, il s’excusa d’y accéder, se fondant sur les instructions qu’il avait reçues de la Compagnie.

Nous avons vu combien ces instructions avaient été peu avantageuses aux Anglais. Quoique possesseurs de l’empire des mers, au moment où la guerre éclatait, ils avaient été empêchés par la liaison de Dupleix avec Anwaroudin, de profiter de tous leurs avantages. Il leur était interdit de trafiquer sur la côte et ils avaient été contraints de borner leurs opérations à la capture de quelques navires marchands égarés sur les mers. La Cour des Directeurs se croyant sûre de sa conquête n’avait pas même supposé que Madras se trouvât jamais en danger. En conséquence, on avait négligé de se procurer des soldats pour sa défense. Il ne paraît même pas que la possibilité d’un cas où la défense serait nécessaire, se fût jamais présentée à l’esprit du Gouverneur Morse. Cependant, quand les nouvelles se succédant rapidement au fort Saint-Georges, il fut connu que l’escadre de La Bourdonnais avait quitté l’Île de France, qu’elle avait combattu et repoussé l’escadre anglaise devant Négapatam, qu’elle était arrivée à Pondichéry, et se préparait à une attaque contre Madras lui-même, on peut s’imaginer la surprise et la consternation qui se répandirent dans la ville. Les défenses du fort Saint-Georges n’étaient pas formidables. Le fort lui-même, construction oblongue, de cent mètres de large sur quatre cents de long, était entouré d’un mur de peu d’épaisseur, et défendu par quatre bastions et quatre batteries, d’une construction défectueuse et peu solide ; il n’existait pas d’ouvrages extérieurs. La garnison anglaise comptait trois cents hommes parmi lesquels étaient des vagabonds, des déserteurs portugais et des nègres, et, en réalité, il y avait à peine deux cents hommes propres au service. En fait d’officiers, il y avait trois lieutenants, dont deux étaient des étrangers, plus sept enseignes sortis des rangs[1].

Dans cette extrémité, le Gouverneur Morse eut recours au nabab du Carnate. On se rappelle que quand ce personnage avait interdit toute hostilité de la part des Anglais contre les possessions françaises

  1. East India Chronicle.