Page:Malleson - Histoire des Français dans l’Inde.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
122
LA BOURDONNAIS ET DUPLEIX

sur la côte de Coromandel, il avait accompagné cet ordre de la promesse que, si, dans l’avenir, les Français obtenaient une certaine supériorité, il leur imposerait la même restriction. Cet événement, alors si peu probable qu’on l’avait cru impossible, s’était maintenant réalisé et les Français se préparaient à attaquer les établissements anglais de la côte de Coromandel. Le Gouverneur Morse réclama l’intervention du nabab.

On ne peut supposer qu’un homme qui connaissait si bien les usages de l’Inde, ignorât les formalités indispensables pour s’approcher d’un chef indien. C’est une coutume consacrée par le temps dans les cours orientales, qu’un envoyé ne se présente jamais devant le prince auprès duquel il est accrédité sans être muni de présents. Que la coutume soit bonne ou mauvaise, telle n’est pas la question ; elle existait déjà et les Anglais l’observent encore de nos jours ; la négliger, c’était commettre, à l’époque qui nous occupe, une véritable insulte. Mais le Gouverneur Morse agit avec le sans-façon anglais, comme s’il eût traité avec des compatriotes et négligea cette précaution. Son ambassadeur parut en présence du nabab, les mains vides, pour lui rappeler simplement sa promesse et réclamer pour les Anglais la protection qu’il venait d’accorder à l’ambassadeur français. Mais celui-ci, en revenant demander l’autorisation de châtier ses rivaux, avait eu soin d’apporter des présents. À son arrivée, l’envoyé anglais trouva le nabab indécis ; tout en refusant de donner aux Français la permission formelle d’attaquer Madras, néanmoins il ne le leur défendait pas positivement.

Le Gouverneur Morse était encore sous l’impression du désappointement causé par l’insuccès de ses négociations avec le nabab, quand, le 29 août la flotte de La Bourdonnais parut en rade. À la manière inhabile dont elle manœuvrait, il était aisé de juger que le célèbre amiral qui avait amené les vaisseaux de l’Île de France n’était pas à bord[1]. Ne voyant pas de flotte anglaise, et trouvant la route libre, M. de la Porte-Barré se contenta, ainsi que nous l’avons vu, de la capture de deux navires marchands qu’il rencontra dans la rade et revint à Pondichéry le 5 septembre. Huit jours

  1. Orme.