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FERMETÉ DE DUPLEIX

mettre à sa merci les intérêts français, jugeant qu’il valait mieux garder Madras, que de le rendre tel qu’il était. Mais, tout en s’arrêtant à cette détermination, il voulut, en obtenant un délai, épuiser toutes les chances d’éviter les hostilités qui, pour la première fois, menaceraient la colonie. Il se considéra comme délié de sa promesse par le fait que le nabab cherchait maintenant à obtenir par la force des armes, ce que lui, Dupleix, était tout disposé à faire dès la première occasion compatible avec sa propre sécurité.

Ayant adopté ce plan de conduite, il envoya à D’Esprémesnil l’ordre de garder Madras à tout événement, et de s’abstenir à l’égard des troupes de Maphuz Khan de tout acte d’hostilité qui ne serait pas rendu inévitable pour la défense de la place. La garnison française se composait de cinq à six cents Européens et d’environ autant d’indigènes disciplinés à l’européenne. Conformément aux ordres qu’il avait reçus, D’Esprémesnil, à l’approche de l’ennemi, fit rentrer toutes ses troupes dans l’intérieur de la ville avec l’intention formelle de se borner à une stricte défensive. Mais comme Maphuz Khan se montrait fort impatient d’attaquor et qu’en peu de jours il détourna la seule source d’eau douce nui alimentât la ville, D’Esprémesnil dut abandonner sa prudente politique et tenter une sortie. Le 2 novembre au matin, il détacha un corps de quatre cents hommes munis de deux pièces de campagne pour attaquer la portion de l’armée ennemie qui gardait la source. Quand cette poignée d’hommes, suivie de deux canons, s’avança, marchant, semblait-il, vers une ruine certaine, en présence des forces considérables du Mogol, la cavalerie ennemie se rassembla et s’élança à leur rencontre, dans le but de les culbuter. Mais les Français, ne se laissant pas intimider par l’apparence imposante de l’escadron qui les menaçait, avançaient toujours avec calme. Quand ils jugèrent que les Indiens étaient à portée du canon, ils firent halte et, ouvrant les rangs, démasquèrent leurs pièces. La première décharge porta au centre de la cavalerie et tua un certain nombre de chevaux ; il en résulta un moment de confusion et d’hésitation dont les Français profitèrent pour charger de nouveau. Les ennemis connaissaient si peu l’artillerie européenne qu’ils regardaient un coup par quart d’heure comme un résultat très-satisfaisant ; ils ne s’at-