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LES ANGLAIS FORCÉS DE SE RETIRER

saient leurs ouvrages. Cependant, ils avaient déjà réussi à pousser leurs tranchées jusqu’à huit cents mètres des murs, quand ils arrivèrent à un marais qui leur prouva l’impossibilité d’aller plus loin, et ils durent se résigner à raser les batteries qu’ils avaient élevées. Ils changèrent donc de direction, et ouvrirent un feu bien nourri contre une autre partie de la ville ; mais ils reconnurent bientôt que, grâce à l’énergie de Dupleix, le feu des assiégés était double du leur, et les vaisseaux de la flotte qui, en dernière ressource, furent appelés à bombarder la ville, se virent en peu de temps forcés de prendre le large, après avoir reçu plus de dommages qu’ils n’en avaient pu causer[1]. La défense futsiénergique_, si déterminée, si victorieuse, qu’au bout de cinq semaines, l’amiral anglais reconnut qu’au lieu de rien gagner, il avait perdu une partie de ses meilleurs officiers et beaucoup d’hommes, et que dailleurs l’ennemi était en position de répondre à ses diverses attaques par un feu beaucoup plus meurtrier que le sien. Ajoutons que les pluies périodiques, qui avaient commencé à la fin de septembre, causaient des maladies dans son camp, etl’avertissaient que ses traverses n’étaient qu’à leur début. En présence de ces faits, et après avoir pris l’avis d’un conseil de guerre, il commença le 14 octobre à détruire ses batteries, et le 17, cette armée, la plus importante qui eût foulé le sol indien et qui comptait un Clive[2] dans ses rangs, se débanda et se retira sur le fort Saint-David, après avoir perdu mille soixante-cinq hommes, victimes du feu de l’ennemi ou de la maladie.

C’est ainsi que Dupleix, par sa fermeté, son mérite, l’étonnante activité de son génie, avait su déjouer cette grande entreprise qui devait amener la destruction de l’Inde française et déraciner les établissements de cette nation du sol de l’Indoustan. Quand nous jetons un coup d’œil rétrospectif sur tout ce qui avait été accompli

  1. L’auteur du Journal que nous avons déjà cité, fait naïvement remarquer que, par suite de la distance qui séparait les navires de la ville et, par l’effet de la houle, les coups ne portaient jamais deux fois sur le même objet.
  2. L’auteur du Journal s’exprime ainsi : « Le célèbre Lord Clive, alors enseigne, servit en cette occasion dans les tranchées, et par sa bravoure, donna les premiers indices de ce grand esprit militaire qui, par la suite, présida à ses actions et fut la principale source de cette intrépidité et de cet esprit élevé qui furent ses dons les plus remarquables. »