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L’INDE FRANÇAISE À SON ZÉNITH

sortie. Il rejoignit sa cavalerie aux prises avec Chunda-Sahib et les Français ; le combat continua jusqu’à ce qu’on eût atteint l’enceinte boisée, mais arrivé là, Morari-Rao jugea prudent de se retirer.

Dans cette action, les Français perdirent dix-neuf hommes, en outre des quarante abandonnés lors de la retraite, et un assez grand nombre furent sabrés par les indigènes ; ceux qui purent s’échapper de leurs mains tombèrent au pouvoir des Anglais. Dupleix fut encore moins afûigé de ces pertes en hommes et en canons, que de la ruine de ses projets. Nous avons dit qu’il était sur le point d’amener Nazir-Jung à entrer en arrangement avec lui ; il ne s’était pas laissé arrêter par la sédition de ses officiers ni par le mauvais esprit qui s’était répandu dans ses troupes, et il est probable que si l’armée avait conservé sa position un seul jour de plus, Nazir-Jung aurait signé le traité ; mais cette révolte perdit tout.

« Il est aisé d’imaginer, dit-il dans ses Mémoires en s’exprimant à la troisième personne, quelle fut la douleur du sieur Dupleix, en apprenant tous les détails de la conduite de nos lâches officiers et pour surcroît de malheur le désastre de Mouzaferzingue qui, ayant négligé de suivre notre armée, était tombé avec la majeure partie de ses troupes aux mains de Nazir-Jung. » La nouvelle n’était que trop vraie. Quoique Nazir-Jung eût juré sur le Coran de rendre à son neveu les gouvernements qu’il avait jadis occupés, cependant, suivant une coutume usitée en Europe au treizième et au quatorzième siècle, comme dans l’Inde au dix-huitième, il le chargea de fers. Il devint ainsi le soubab sans rival du Décan, et l’un des premiers actes de son autorité fut de nommer Mahomed-Ali nabab du Carnate. C’est ainsi que furent déjouées les combinaisons au moyen desquelles Dupleix espérait amener l’Inde méridionale à se dévouer complètement au service des intérêts de la France. Ah ! sans doute, sa douleur dut être profonde, mais quelle qu’en fût l’étendue, elle ne put le réduire au désespoir ni l’entraîner à abandonner ses plans. Au contraire, il sembla qu’il en recevait une nouvelle impulsion pour se mettre à la recherche d’expédients nouveaux et plus hardis.

Ce furent les officiers révoltés qui répandirent eux-mêmes dans