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DUPLEIX AUX PRISES AVEC L’ADVERSITÉ

dans de précédentes occasions, de donner l’exemple à leurs alliés indigènes. Tous les récits des historiens et les Mémoires de Dupleix s’accordent à reconnaître qu’ils manquèrent à ce devoir, et que la faute doit en être attribuée à la maladie ou à l’apathie du général et au défaut d’initiative des officiers.

Jamais une occasion favorable ne s’était offerte à eux sans qu’ils en tirassent quelque parti, et celle-ci devait moins que toute autre être négligée. Les troupes sous les ordres du capitaine Gingen composaient, sauf cent quatre-vingts hommes que le capitaine Cope avait à Trichinopoly et quelques-uns laissés pour garder Madras et le fort Saint-David, toutes les forces anglaises sur la côte de Coromandel[1]. Quelque peu d’énergie de la part de d’Auteuil et de ses officiers aurait non-seulement assuré la destruction de ces forces, mais entraîné, comme conséquence nécessaire, la chute de Trichinopoly, et forcé les Anglais qui auraient pu survivre à se renfermer dans les limites des possessions anglaises de la côte. Ceci n’est pas une vaine supposition et il est facile d’en donner des preuves positives. La panique dont fut saisie la petite armée du capitaine Gingen fut telle, que les soldats laissèrent à leurs alliés le soin de combattre, pendant qu’ils fuyaient en désordre. Ils ententendirent sans honte les railleries du frère de Mahomed-Ali sur leur lâcheté, et quoiqu’ils ne fussent pas poursuivis, ils abandonnèrent artillerie, armes et munitions au milieu de la nuit, et prirent, sans s’arrêter, la direction de Trichinopoly. Est-il possible de douter qu’une vigoureuse poursuite de l’ennemi eût produit un effet décisif sur des hommes frappés de terreur à ce point ? Il est permis de croire que la ruine des Anglais en eût été le résultat inévitable.

Mais aucune poursuite ne fut tentée le même jour : d’Auteuil se contenta de s’assurer la possession de Volconde, et, le lendemain matin, voyant que l’ennemi avait disparu, il suivit sa trace et fit halte à quelques milles en deçà de la position qu’occupaient les Anglais dans le pays montagneux qui environne Ootatoor, à environ vingt milles au Nord de Trichinopoly. Pendant cette halte de trois

  1. Les renforts dont nous parlerons bientôt n’arrivèrent au fort Saint-David qu’à la fin de juillet.