Page:Malleson - Histoire des Français dans l’Inde.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
PREMIER ÉTABLISSEMENT À MADAGASCAR

l’Espérance, avec tout son équipage et une cargaison évaluée de soixante-dix à quatre-vingt mille livres sterling, coula bas en quittant Java. Après cette perte, Beaulieu fit voile pour le Havre avec ses autres navires bien chargés, et y arriva le Ier décembre 1620.

Il se passa plus de vingt ans après cette seconde expédition sans que la Compagnie tentât rien pour s’ouvrir des voies commerciales en Orient. Quelques eflorts passagers faits par des négociants isolés pour créer un établissement à Madagascar ne produisirent aucun résultat positif. Le puissant ministre qui alors gouvernait virtuellement la France s’occupa, pendant presque toute la durée de son administration, d’assurer d’une manière stable l’autorité de son maître sur les nobles récalcitrants, et n’eut que bien peu de temps à consacrer aux soins nécessaires pour assurer l’extension du commerce. Cependant en 1642, Richelieu, devenu maître, ayant triomphé de tous ses ennemis, s’occupa de renouer des relations commerciales avec l’Orient. Sous ses auspices une nouvelle Compagnie se forma dans le but avoué de trafiquer avec les Indes. Des lettres-patentes datées du 24 juin 1642 lui accordèrent un privilège exclusif de vingt années ; ses directeurs, la désignant sous le nom de Compagnie des Indes, commencèrent des préparatifs sérieux pour justifier ses droits à ce titre. Le premier navire venait de partir quand Richelieu mourut. Cet événement n’altéra en rien la détermination qui avait poussé la Compagnie des Indes à consacrer en premier lieu toute son énergie à l’exploitation de l’île de Madagascar, si grande et si fertile.

Éclairés comme nous le sommes par les événements subséquents, il ne nous sied pas de déclarer que cette détermination manquât de sagesse. Il semble, au contraire, qu’elle fut dictée par une politique profonde et prévoyante. La possession du Cap de Bonne-Espérance par les Portugais avait démontré les avantages d’une station entre l’Europe et les Indes ; les Français étaient trop prudents pour négliger cet exemple au moment d’entreprendre pour la première fois un commerce lointain. Quoique forcés, après plusieurs tentatives, d’abandonner leurs prétentions sur Madagascar, ils ne le firent pas avant de s’être emparés de plusieurs petites îles qui en