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DUPLEIX AUX PRISES AVEC L’ADVERSITÉ

qui entend ; mais, hélas ! il n’était pas en son pouvoir d’être tout à la fois l’esprit qui conçoit et le bras qui exécute. Il avait donné à Law tous les renseignements possibles, mais il avait laissé au militaire le soin d’accomplir son devoir. Ces résultats montrèrent que le seul port des épaulettes ne fait pas d’un homme un soldat, que s’il est dépourvu de cette intelligence qui doit être le don de Dieu et ne s’infuse pas, comme certaines personnes paraissent le croire, par l’habit qu’il porte, cet habit même et la soi-disant science qui s’y attache, ne servent qu’à rendre le pédant plus pédant, l’esprit étroit plus vaniteux, plus obstiné, plus dédaigneux de l’opinion des hommes plus sages que lui qui n’en sont pas revêtus.

Law était venu à Dupleix recommandé par les Directeurs et par ses propres affirmations. Il se vantait d’être un militaire : s’il avait seulement agi comme un homme de simple bon sens, on aurait pu lui pardonner d’être vaincu par le génie d’un Clive ou la persévérance d’un Lawrence ; mais il est clair qu’il eût échoué également devant des adversaires d’un mérite très-inférieur. Il suffisait que son antagoniste sût marcher en avantj qualité plus rare qu’on ne le croit généralement, pour que Law succombât. Il faisait tout hors de saison, et cela parce qu’il n’y avait en lui du militaire que l’habit.

Il n’est pas possible de décrire la douleur de Dupleix, et nous n’essayerons pas de le faire. Nous nous occuperons plutôt des mesures que, malgré tout son désappointement, il adopta sans hésitation, pour remédier autant que possible à ce désastre. Sa position n’était pas facile ; où trouverait-il un général ? De Bussy, le seul commandant capable, était à Aurungabad avec le soubab ; Law était sans ressources à Trichinopoly ; il avait bien encore d’Auteuil, mais infirme, épuisé par le climat, l’âge, la goutte, et certainement incapable de tenir tête à la vigoureuse énergie de Clive. Il lui sembla encore préférable de conserver Law, qui au moins était jeune, plutôt que de confier à d’Auteuil les débris d’une armée.

Mais deux jours après qu’il eut appris l’entrée de Lawrence dans Trichinopoly, et avant qu’il eût eu le temps d’agir, Dupleix reçut