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RETRAITE DANS L’ÎLE DE SERINGHAM

ratifs du passage du Cauveri, afin de se retirer dans l’île de Seringham.

Il y a tout lieu de croire que Law nourrissait depuis longtemps ce projet, car il en avait souvent représenté la nécessité à Chunda-Sahib, et en avait entretenu Dupleix dans sa correspondance. Chunda-Sahib lui avait non-seulement démontré la folie d’un parti semblable, mais encore avait refusé de se joindre à lui, et Dupleix, quoique s’étant longtemps refusé à croire un tel projet sérieux et possible, lui avait cependant fait observer, dans les termes les plus clairs, qu’il compromettrait ainsi gravement les troupes qui lui étaient confiées et les intérêts de l’Inde française. En apprenant que du projet il allait passor à l’exécution, Dupleix avait répondu par l’ordre impératif de se retirer sur Pondichéry, et la substitution de d’Auteuil à Law. Il est vraiment difficile de comprendre qu’un homme en possession de toutes ses facultés ait jamais pu croire que Seringham fût un lieu convenable pour s’y retirer. D’abord il était à portée du canon de Trichinopoly ; en second lieu, un ennemi entreprenant devait naturellement être tenté de poursuivre une petite armée qui se retirait devant lui dans une île entourée de rivières faciles à traverser, et si cette armée ne recevait pas de renforts il lui serait aisé de la forcer à se soumettre. Une telle détermination, prise en face d’un Clive, révélait, nous l’avons dit, une prostration complète dans les facultés de celui qui s’en rendait coupable. De tous les lieux de retraite qu’on aurait pu choisir, Seringham était sans comparaison celui qui devait le plus complètement détruire toute espérance de salut pour les troupes qui y étaient renfermées, et se trouvaient en face d’un ennemi assez fort pour agir sur les deux rives. Et c’était là que Law avait résolu, non par une aberration subite, mais après de longues réflexions, de conduire l’armée qu’il commandait. Et encore, avec cette préméditation, ne s’était-il occupé d’aucun des préparatifs nécessaires. Peut-être espérait-il après tout qu’il en serait dispensé. Ce qui est certain, c’est que jusqu’au moment où la vue des Anglais s’éloignant de lui fit apparaître si fortement à son esprit l’idée des dangers qui pouvaient lui être réservés sur la rive droite, il n’avait préparé quoi que ce soit pour la retraite qu’il méditait. Cependant, bien décidé à l’effectuer il