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DUPLEIX AUX PRISES AVEC L’ADVERSITÉ

conséquence inévitable pour Chunda-Sahib. Se rendre aux Anglais était hors de question, puisque la France et l’Angleterre n’étaient pas en guerre. Les Anglais et les Français n’étaient que de simples mercenaires à la solde des parties belligérantes, et quels que fussent les vainqueurs, il ne leur appartenait pas d’intervenir ouvertement dans la direction des affaires. La proposition de se soumettre aux Anglais ne pouvant donc être écoutée, ne devait pas même être faite. Quant à Mahomed-Ali, habitué à regarder comme légitimes tous les moyens de se délivrer de son rival, on ne devait pas s’attendre qu’il hésitât sur le châtiment à infliger à un adversaire aussi persévérant, aussi hardi et aussi fertile en expédients que le protégé des Français. Tout en rejetant les conseils et en se déterminant à capituler, Law cherchait les moyens de sauver la vie de son allié. Dans ce but, il ouvrit des négociations avec Manokdgi, général de l’armée du rajah de Tanjore. Ce chef accepta avec empressement les offres qui lui étaient faites, reçut une partie de la somme stipulée, jura solennellement de protéger la vie du nabab fugitif, et envoya dans la nuit du 11 juin un détachement chargé d’escorter le palanquin de Chunda-Sahib. Mais cet infortuné ne fut pas plus tôt arrivé dans le camp, qu’il fut violemment saisi, chargé de fers et remis à des gardes. Le lendemain, le major Lawrence fut présent à une conférence dans laquelle on discuta sur le sort du prisonnier. Il n’était pas douteux qu’en prenant une attitude ferme, surtout le jour suivant lorsque les Anglais furent devenus par la reddition de Law les maîtres absolus de la situation, le major aurait sauvé la vie de Chunda-Sahib. Il raconta lui-même que, dans la discussion, il garda d’abord le silence, puis proposa que ie nabab fût remis aux Anglais. Cet avis fut combattu, et l’on se sépara sans avoir pris de résolution. Le lendemain, Manokdgi ayant demandé à Lawrence s’il désirait sérieusement être chargé du prisonnier, le commandant anglais déclara qu’il ne se souciait pas de s’en mêler davantage[1]. Ce fut un arrêt de mort, et quelques heures plus tard

  1. Cette légèreté et cette indifférence, pour ne pas dire plus, du commandant anglais, ont été traitées avec beaucoup d’indulgence par la plupart des historiens de sa nation. Le récit d’Orme, cet écrivain si opposé aux Français, montre qu’il était complètement au pouvoir de Lawrence de sauver Chunda-Sahib ; il lui aurait suffi d’étendre la main. Orme, après avoir fait allusion à la querelle qui s’éleva entre Mahomed-Ali, les Myso-