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ILLUSIONS DE LA COMPAGNIE

garnison française, composée de quarante Européens et cinq cents Cipayes, à l’évacuer. De là, il retourna à Madras, puis fit voile pour l’Angleterre.

Cependant, malgré ces échecs, un examen soigneux de la position de Dupleix à la fin de 1752, mise en regard de l’état où il avait été réduit six mois auparavant par la reddition de Law et de d’Auteuil, nous fera apprécier tout ce que son vaste génie avait su accomplir dans un aussi court intervalle. Pour faire utilement pet examen, il faut avoir présentes à l’esprit ses relations avec les Directeurs de la Compagnie des Indes. Cette Compagnie qui, ne possédait pas le quart des richesses de la Compagnie anglaise, s’était flattée de l’espoir que Dupleix, maître du Carnate, était dans une position trop bien assurée pour qu’il eût désormais besoin de l’aide de la France. Les Directeurs s’attendaient même à ce que Dupleix leur envoyât bientôt de fortes sommes d’argent. Il est vrai que, jusqu’à la fin de 1751, sa situation autorisait les hommes d’État français à concevoir les plus grandes espérances sur l’avenir de rinde française. Mais c’était justement la raison qui aurait inspiré à des politiques habiles la volonté de l’aider et de le soutenir par tous les moyens dont ils pouvaient disposer. En 1751, l’envoi de deux ou trois mille hommes à Pondichéry aurait incontestablement assuré à la France la possession absolue de l’Inde méridionale. Elle ne se serait pas ressentie de leur absence, et ils ne pouvaient manquer de lui acquérir cette proie si précieuse. Au lieu de secourir ainsi Dupleix, la Compagnie lui coupait les vivres ; elle lui envoyait fort peu de navires et pas du tout de fonds ; les quelques hommes dont il fallait faire des soldats et qui devaient donner à la France un empire plus grand qu’elle-même, étaient le rebut des prisons et des galères. Quand il demandait un général capable, on lui envoyait Law ! Il est vrai que, sous l’impression des espérances que lui inspirait le succès de ses vastes plans, on lui adressait des lettres flatteuses et un marquisat : mais Dupleix aurait fait bon marché de récompenses aussi creuses pour obtenir quelques centaines de ces soldats qui gaspillaient leur temps dans les garnisons. Ainsi abandonné à ses propres ressources, nous le voyons tirer du néant les forces matérielles, et attirer à lui des alliés lorsqu’il semblait voué à une destruction certaine,