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SYUD-LUSUKUR-KHAN

n’avait pas été sans s’apercevoir des signes de mécontentement qui se produisaient, mais il lui avait paru qu’il était moins désirable pour les intérêts français que pour ceux du soubab qu’on marchât sur Pounah. Il résolut donc d’agir d’une façon qui, tout à la fois, apaiserait les mécontents et satisferait les intérêts de ses compatriotes. Soit ouvertement, soit en secret, il appuya donc les propositions de paix, afin de désarmer ainsi ses ennemis et de gagner encore plus complètement la confiance du soubab.

L’armistice conclu, l’armée retourna vers Golconde, châtiant sur sa route quelques rajahs qui refusaient le tribut. Mais pendant qu’elle était en marche, il se produisit un fait qui nécessita une prompte intervention de la part de Bussy. Le premier ministre du soubab, Rajah-Rugounath-Dass, homme dévoué aux intérêts français, fut assassiné par quelques soldats afghans dont il avait insulté l’officier. Il fallait diriger le choix du soubab sur quelque personnage convenable pour le remplacer. Pour la première fois, de Bussy se laissa duper : il avait rencontré à la cour du soubab un noble appelé Syud-Lushkur-Khan, homme fort adroit et d’une grande habileté, qui avait deviné les projets des Français, haïssait leurs personnes et redoutait leur influence. Afin de contre-carrer leurs plans, il dissimula ses sentiments, et afîecta, pour de Bussy en particulier, une grande estime et un profond dévouement. Il espérait obtenir ainsi un emploi sous le soubab, et, une fois arrivé à ce poste, déjouer la politique française et miner la position du commandant. De Bussy s’y laissa prendre ; il crut que Syud-Lushkur était ce qu’il paraissait être, le recommanda au soubab comme un homme apte à remplacer le rajah décédé, et obtint pour lui cet emploi.

De Bussy avait beaucoup à faire avant que les intrigues mises en œuvre par le premier ministre eussent pu produire quelque effet. Gazi-Oudin était encore menaçant. Bien loin d’avoir réduit ses prétentions après la défaite de Balladgi, il avait invité Bhonsla à attaquer le Décan au Nord-Ouest, tandis que, avec l’aide de Mulkar-Rao, Holkar y entrerait par la porte d’Aurungabad. L’invasion dont Amed-Shah-Abdali menaçait l’Indoustan, concourait, avec l’attitude hostile des Rohillas et les intrigues de la cour de Delhi, à retenir Gazi-Oudin dans cette capitale plus longtemps qu’il n’avait