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ADMIRABLE CONDUITE DE LAWRENCE

sur le flanc droit, par le feu inattendu des grenadiers parvenus sur le Rocher ; et avant que les soldats eussent eu le temps de revenir de leur surprise, une nouvelle décharge, suivie d’une charge à la baïonnette, mit le comble à leur désordre. Les officiers français, et plus que tout autre le vaillant Astruc lui-même, firent tous leurs efforts pour les ramener au combat : ce fut en vain. Frappés de terreur panique par la soudaineté de l’attaque, au moment où la victoire paraissait assurée, les soldats français s’éloignèrent du champ de bataille, laissant à Morari-Rao et à ses Mahrattes le soin de couvrir leur retraite. Ces célèbres cavaliers s’acquittèrent de ce soin avec leur bravoure habituelle. Ils cherchèrent même à disputer le champ de bataille aux anglais, lorsque Lawrence reprit sa position avec les trophées de la journée, deux canons qu’il avait capturés. Mais le petit corps anglais, formé en carré mouvant, repoussa toute attaque ; puis, faisant halte, dirigea un feu si continu sur les masses, qu’elles se débandèrent et prirent la fuite dans toutes les directions.

ïl est impossible d’attribuer une trop grande valeur au service que Lawrence rendit à sa patrie dans cette journée mémorable. Sans son incomparable sang-froid et sa présence d’esprit, Trichinopoly ne pouvait manquer d’être perdu, avec toutes les conquêtes si chèrement payées par les Anglais l’année précédente. Il aurait dû s’estimer heureux si, en face de l’innombrable cavalerie mahratte et des troupes françaises enhardies par la victoire, il avait pu échapper au sort de Law. Son mérite fut d’autant plus grand, que le commandant français né commit aucune faute importante. Son plan avait été bien conçu, bien exécuté. Il ne pouvait prévoir que ses soldats lâcheraient pied dans le lieu même où ils avaient naguère vaincu sans coup férir. Il agit, dans toute cette journée, avec autant de courage que de jugement, et s’il succomba, ce fut par suite d’un événement qui défiait toutes les prévisions et contre lequel il n’avait pu se prémunir. Le plus grand honneur appartient donc à l’officier anglais, qui sut tout oser en face d’un ennemi supérieur plutôt que de lui céder le champ de bataille.

Il ne nous est pas possible de quitter ce sujet sans faire un juste éloge de ces braves troupes qui le suivirent si vaillamment. Ces