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SUCCÈS PASSAGERS DES FRANÇAIS

moitié réussi à détacher de son alliance le rajah dont il défendait le pays.

On verra ici que Dupleix avait bien quelque raison de maintenir ses exigences dans les négociations avec les Anglais. S’il avait été un prince absolu, nous ne pouvons douter que sa politique n’eût fini par triompher. Le dernier allié des Anglais, le rajah de Tanjore, était prêt à les abandonner, et malgré les revers de l’année précédente, au milieu de 1754, Dupleix avait devant Trichinopoly une position plus forte que jamais. Les fameux grenadiers qui avaient tant contribué au succès de Lawrence, avaient été tués ou faits prisonniers ; les troupes françaises reprenaient l’offensive et, victorieuses dans plusieurs escarmouches, menaçaient les possessions des Anglais et de leurs alliés sur tous les points vulnérables. Ces derniers étaient venus à mettre en question si l’alliance anglaise valait d’être conservée, quand elle les exposait à tant de dangers et était une charge si lourde pour le pays.

Mais au moment où les affaires prenaient ainsi une tournure favorable, il se présenta des circonstances auxquelles Dupleix aurait dû s’attendre, mais qu’il n’avait pas suffisamment prévues.

Les succès de Bussy au Nord, ceux de Mainville et de ses partisans au Sud-Ouest, n’avaient plus grande valeur du moment que le Gouverneur ne possédait plus la confiance de ses supérieurs en France. Dans ces temps où une communication ne pouvait arriver dans la mère-patrie en moins de six à huit mois, Dupleix aurait dû être préparé à l’impression que devaient produire les désastres de 1753 sur une corporation dont il savait bien que la grande minorité lui était hostile. La prévision des conséquences qui devaient naturellement suivre la nouvelle de revers si préjudiciables aux finances de la Compagnie, aurait dû l’influencer puissamment et le disposer à conclure la paix avec le gouvernement anglais. Il est d’autant plus étrange que cette considération n’ait pas eu plus de poids sur lui, qu’il connaissait la jalousie excitée par ses actes et savait bien que le succès seul dans l’Inde pourrait maintenir sa position à l’égard des Directeurs. Peut-être, et de nos jours nous avons eu un mémorable exemple de cette politique, éprouvait-il le mépris qu’un grand génie ressent pour des hommes