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INDIGNE TRAITEMENT DE DUPLEIX

fût réintégré dans son commandement. Il fut bien reçu, et on lui donna l’espoir de voir admettre ses réclamations. Mais aussitôt que la paix désavantageuse faite par Godeheu fut connue en France, le ministre commença à le traiter comme un homme dont on n’avait plus rien à attendre et qui allait l’importuner de ses demandes. Les ministres, ou plutôt, de concert avec eux, les Directeurs de la Compagnie changèrent d’attitude à son égard et refusèrent positivement de prendre ses comptes en considération. Ses remontrances demeurèrent sans effet ; ce fut en vain qu’il affirma que les créanciers qui le poursuivaient n’étaient créanciers que parce que, sur sa garantie, ils avaient avancé des fonds pour le gouvernement de Pondichéry. Ce fut en vain qu’il rédigea un mémoire établissant dans un style modeste et explicatif tout ce qu’il avait fait et les sommes qu’il avait avancées. Pendant sept ans, il réclama de la manière la plus pressante et fournit les preuves les plus incontestables de ses droits. Il ne reçut pas même Tombre d’une satisfaction, et, de plus, il vit ceux de ses amis qui avaient avancé des fonds au gouvernement de Pondichéry l’attaquer pour être remboursés ; de Bussy lui-même, qui devait être son gendre, le délaissa dans cette extrémité, rompit son mariage et ajouta son nom à la liste de ceux qui le poursuivaient. Le malheureux Dupleix fut réduit à un tel état de misère que, trois mois avant sa mort, sa maison était envahie par les recors. Voici ce qu’il écrivait dans ses Mémoires lorsqu’il n’avait plus que trois jours à vivre : « J’ai sacrifié ma jeunesse, ma fortune, ma vie pour enrichir ma nation en Asie. D’infortunés amis, de trop faiblés parents consacrèrent leurs biens au succès de mes projets. Ils sont maintenant dans la misère et le besoin. Je me suis soumis à toutes les formes judiciaires ; j’ai demandé comme le dernier des créanciers ce qui m’est dû. Mes services sont traités de fables ; ma demande est-dénoncée comme ridicule ; je suis traité comme l’être le plus vil du genre humain. Je suis dans la plus déplorable indigence : la petite propriété qui me restait vient d’être saisie : je suis contraint de demander une sentence de délai pour éviter d’être traîné en prison. » Telles étaient, à la veille de sa mort, les doléances de l’homme qui avait tant fait