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EXPULSION DES FRANÇAIS DE SAINT-THOMÉ

prendre la direction qu’ils préféreraient[1]. Si le but des Hollandais était d’expulser les Français de l’Inde, ils eurent bien lieu de regretter une capitulation renfermant une pareille clause dont ils étaient loin sans doute de prévoir les conséquences.

La garnison, résolue mais peu nombreuse, ne s’était pas dissimulé qu’elle aurait à subir une capitulation, et était préparée à cette épreuve. Libre de choisir le lieu de leur retraite, soixante d’entre eux s’étant décidés en faveur de la concession qu’ils avaient achetée au Nord du Coleroon, partirent sous les ordres de François Martin et arrivèrent à leur destination dans le mois d’avril 1674. Ils avaient tout à créer et ne disposaient que de minces ressources. Les autres, et c’était la majeure partie, préférèrent retourner à Surate, sur les vaisseaux qui leur étaient restés ; de ce nombre étaient les deux Directeurs Lahaye et Baron[2].

Martin était maintenant en possession d’une autorité sans partage. Il avait avec lui soixante Européens, y compris l’équipage de la frégate la Vigilante, seul vaisseau qui lui fût demeuré ; il avait de plus, toutes les valeurs mobilières apportées de Saint-Thomé et une somme assez considérable en espèces. Son premier soin fut d’obtenir du gouverneur l’autorisation d’élever toutes les constructions nécessaires pour garantir la population et les propriétés d’une attaque imprévue. Les relations qu’il avait nouées avec lui, étaient telles que la permission demandée fut accordée sans difficulté. La prépondérance de la Hollande sur les mers interdisait à Martin tout commerce avec l’Europe et le gouverneur, manquant de fonds tandis qu’il ne pouvait tirer parti des siens, il avait jugé d’une bonne politique de lui en prêter au taux alors modéré de dix-huit pour cent. Le caractère de Shere Khan Lodi permettait au Français de le faire sans beaucoup risquer ; et, contrairement au vieux proverbe, cette transaction lui fit de l’emprunteur un ami dévoué[3]. Sous sa protection, de chétives fortifications et des habitations

  1. Annales des Provinces-Unies.
  2. Il semble que Lahaye et Baron aient visité, en allant à Surate, le lieu sur lequel Pondichéry fut plus tard construit. De Surate, Baron écrivit à la Compagnie qu’après Saint-Thomé le site choisi par Martin était de beaucoup le mieux approprié à leurs projets sur la côte de Coromandel. (Mémoire dans les Archives de la Compagnie des Indes.)
  3. Mémoire, dans les Archives de la Compagnie des Indes.