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LES PREMIERS FRANÇAIS DANS L’INDE

s’élevèrent rapidement et grâce aux sages rapports de Martin avec les indigènes, ceux-ci créèrent bientôt, à l’abri du nouvel établissement, un petit village dont la population travaillait pour la factorerie. Le tout forma une sorte de ville que les natifs appelèrent d’abord Phoolchery, nom qui se transforma en celui de Pondichéry sous lequel les Européens l’ont toujours désignée[1].

Les mesures adoptées par Martin pour régulariser les transactions commerciales, étaient empreintes de la même prudence. Dans ces temps, l’Inde approvisionnait l’Europe de pièces d’étoffes, et les colons portèrent d’abord toute leur attention sur ce genre de commerce et sur les débouchés à lui ouvrir ; leurs efforts eurent un tel succès, que moins de deux ans après leur arrivée, Martin écrivit à la Compagnie qu’il était en mesure de lui expédier annuellement des étoffes pour un million de livres ou même plus. Il donnait en outre une description détaillée du lieu, affirmait qu’il était des plus convenables pour un établissement français, que la rade qui le précédait, le mettant à labri de l’approche des vaisseaux de guerre, le préservait de toute attaque soudaine ; qu’il était bien abrité contre la Mousson, qu’il avait un climat salubre et se trouvait favorablement situé pour les besoins commerciaux. Ce rapport et la correspondance qui l’accompagnait, si différents des nouvelles que présageait la chute de Saint-Thomé, furent reçus avec la plus grande satisfaction par les Directeurs.

Il ne faut pas s’imaginer que les colons fussent entièrement afl’ranchis d’inquiétudes et d’alarmes. Pondicbéry fut, de fait, fondé et élevé au bruit des armes et au retentissement des royaumes qui s’écroulaient. Le Sultanat de Béjapore, dont une partie avait été concédée pour la création de Pondicbéry, cessa en 1676 d’être au nombre des souverainetés indépendantes. Un an plus tard Golconde qui avait concouru à l’expulsion des Français de Saint-Thomé, tombait elle-même en proie à l’insatiable ambition d’Aurengzeb. À la même époque, l’ennemi invétéré de toute autorité établie, Sevadgi, s’occupait de lever des contributions partout où il pouvait en obtenir, d’annexer des villes et des provinces à ses possessions

  1. Chronique du Carnatique de Browne.