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GODEHEU ET DE LEYRIT

fonctions un peu moins de six mois, il s’embarqua pour l’Europe, laissant les affaires de rétablissement aux soins d’un Comité secret composé de MM. Barthélemy, Boileau et Guillard, jusqu’à l’arrivée de son successeur, M. Duval de Lsyrit. Son départ fut salué par la colonie comme un bienfait public. Ce fut de tous ses actes le seul qui produisit dans l’Inde Méridionale un bon effet pour les intérêts français, car il fit circuler le bruit, habilement encouragé par de Bussy, d’un retour probable de Dupleix.

Mais le rappel de cet éminent homme d’État devait être plus durable. Les membres du Comité secret, instruits par l’exemple de Godeheu, et ignorant quelles seraient les vues de M. de Leyrit, ne voulurent rien faire. Répondant à de Bussy qui pressait le gouvernement de Pondichéry de lui donner des instructions sur la marche qu’il devait adopter dans les circonstances difdciles qui se préparaient, ils lui disaient simplement qu’ils avaient reçu toutes les lettres qu’il avait adressées à M. Godeheu, qu’il n’y avait pas répondu lui-même parce que certains points étaient trop délicats pour qu’il put prendre une décision, mais qu’à son arrivée, M. de Leyrit s’expliquerait probablement en détail sur toutes les questions pendantes[1]. La même conduite fut suivie sur tous les sujets de quelque importance, de sorte que du 16 février, jour du départ de Godeheu, jusqu’à l’arrivée de M. de Leyrit, c’est-à-dire au 25 mars, le gouvernement de Pondichéry fut complètement nul.

Quoiqu’il ne fût qu’un homme fort ordinaire, de Leyrit était une bonne acquisition pour le Comité secret. Il avait déjà été employé dans le service civil de l’Inde du temps de Dupleix. Lors de l’expédition de La Bourdonnais, il était agent français à Mahé, et il avait remplacé Dupleix comme Directeur-Général de Chandernagor en 1741. Il aurait probablement été un excellent chef pour une Compagnie purement commerciale, car il était bien au fait des opérations mercantiles : mais il était parfaitement impropre à la politique délicate qui devait guider les relations de Pondichéry avec les chefs indigènes : il manquait aussi de cette stabilité dans les projets et de cette volonté ferme qui pouvaient seules enrayer

  1. M. Barthélemy à de Bussy, 28 février 1753.