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CHANDERNAGOR ET LE DÉCAN

cutta à Oùgli, que Clive reçut la nouvelle, si longtemps attendue, que la France avait déclaré la guerre à l’Angleterre. Il pensa, comme tous les membres du Conseil de Calcutta, qu’elle ne pouvait lui arriver à un moment plus opportun. Il s’applaudit comme eux de ce que les Français n’en avaient pas eu connaissance avant le succès de l’attaque de Calcutta. La nouvelle ne leur parvenait que quand les difficultés de la navigation dans la rivière étaient surmontées, que Calcutta s’était rendu, et qu’ils ne pouvaient mettre en doute l’important effet moral que l’attaque d’Oùgli devait avoir sur les indigènes du Bengale.

Il était important que Clive ne compromît pas, en montrant des intentions hostiles contre l’établissement français du Bengale, une situation d’ailleurs pleine de difficultés. Il ne pouvait croire que le nabab laisserait impunie la prise de Calcutta, et il aurait fallu qu’il fermât les yeux pour ne pas voir la probabilité que les Français, apprenant la déclaration de guerre, s’uniraient au nabab et déjoueraient ainsi, non-seulement ses projets contre eux, mais encore anéantiraient son espoir de réoccuper Calcutta d’une manière permanente. Il ne devait donc pas laisser découvrir à ses ennemis ce qu’il avait dans le cœur ; son jeu était plutôt, dans ces circonstances, de temporiser, d’observer attentivement le cours des événements et de ne laisser échapper aucune occasion favorable.

Le nabab, furieux de la perte de Calcutta et de la destruction d’Oùgli, réunit à la hâte une armée de dix mille hommes d’infanterie et de quinze mille de cavalerie, et se mit en marche pour reconquérir la ville prise par les Anglais. Il envoya en même temps vers Renault, le commandant de Chandernagor, pour l’inviter, de la manière la plus pressante, à se joindre à lui pour anéantir la nation qui était l’ennemie des Français autant que de lui-même.

Renault, de son côté, était dans une situation fort perplexe. Il savait bien que la guerre était déclarée, mais il avait à résoudre une question fort difficile, c’était de savoir si avec ses cent quarante-six Européens, dont quarante-cinq invalides, il devait secourir le nabab, ou chercher à conclure un traité de neutralité avec les Anglais. Dans le premier cas, si le nabab essuyait un échec, la perte de Chandernagor était certaine. Il avait d’ailleurs reçu de