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HÉSITATION DE LAW

halte pour la nuit. L’ennemi, dont la poudre avait été mouillée par une pluie abondante, se relira dans un petit village au pied d’une colline. À la pointe du jour, les Français marchèrent contre le village, et quoiqu’entourés par la cavalerie mahratte, ils s’en approchèrent, les deux chefs que nous avons nommés n’opposant qu’une feinte résistance ; mais un troisième, qui n’était pas ligué avec de Bussy, s’empara de leur bétail, ainsi que des bagages, et s’enfuit avec ce butin. C’était une perte sérieuse ; néanmoins comme il n’y avait de chances de salut qu’en avançant, Law gagna le village et s’y reposa pendant toute la journée ; dans la nuit suivante, quoiqu’il eût à traverser un pays fort difficile où il avait à lutter continuellement contre l’ennemi, il réussit à atteindre Méliapore ; il y reçut le lendemain les dépêches par lesquelles Bussy l’instruisait de ses conventions avec les officiers mahrattes ; il était alors à soixante-dix milles d’Hydérabad, et s’établit dans un vieux fort construit en terre et à demi ruiné, auprès de Méliapore.

Jusqu’ici Law déployait une audace et une énergie que son passé n’aurait pu faire prévoir : tant qu’il fut en marche, il fut soutenu par le vif désir d’avancer et aussi par l’entrain de d’Arambure, son lieutenant ; mais à peine vit-il ses hommes abrités dans le fort de Méliapore, que les sentiments qui l’avaient inspiré à Seringham l’envahirent de nouveau. Ses pertes n’avaient pas été considérables ; il n’avait eu que deux hommes tués et trois blessés, mais son détachement était épuisé de fatigue ; le troupeau et les bagages avaient été la proie des Mahrattes. Le trajet qui restait à faire était encore plus difficile que ce qui avait été accompli. Law prit le parti de camper dans le fort jusqu’à ce que ses troupes fussent remises de leurs fatigues ; ce fut une faute. Les troupes asiatiques ne résistent pas à la marche en avant des Européens : elles en sont aussitôt démoralisées. Si ces derniers font halte, le pouvoir des Asiatiques grandit d’un quart ; s’ils paraissent faiblir ou montrent quelque disposition à se retirer, les Asiatiques leur deviennent égaux en valeur, s’ils le sont en nombre. Les plus grands généraux européens qui ont servi dans l’Inde y ont réussi, parce qu’ils ont compris cette vérité et qu’ils n’ont jamais