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DERNIÈRE LUTTE

donnais, un Bussy, ou Lally lui-même, aurait utilisé pour anéantir les Anglais dans le Carnate ; car, non-seulement les Français étaient les maîtres sur terre, mais ils l’étaient aussi sur mer.

Il va sans dire que, dans une semblable conjoncture, le Gouvernement de Pondichéry devait diriger les forces réunies de Saubinet et de Soupire sur les principales possessions anglaises, le fort Saint-David et le fort Saint-Georges. Le fort Saint-David serait certainement tombeau premier coup de canon, et sa chute aurait tellement ébranlé l’influence anglaise dans le Carnate qu’il n’aurait pas été difficile, — nous dirons plus, sous un chef capable, il aurait été aisé — de porter à Madras le coup fatal, car toutes les troupes anglaises qui n’étaient pas indispensables, avaient été envoyées à Clive au Bengale et la flotte anglaise était encore dans les eaux de l’Oûgli.

Mais ni Leyrit, ni Soupire, ni Saubinet n’étaient à la hauteur de la situation. Le chevalier de Soupire, d’un caractère faible et facile, étranger au pays, se laissa entièrement guider par le Gouverneur. Saubinet était un soldat, brave sur le champ de bataille, mais lui aussi se soumit à l’autorité de Leyrit. Dans cette crise, si importante pour les destinées de la France, tout dépendait de la détermination que prendrait, sur les afi’aires militaires, le Gouverneur civil, animé, il est vrai, des meilleures intentions, mais complètement dépourvu des qualités éminentes qui caractérisent l’homme d’État pratique. Leyrit reconnut bien, ainsi que tous ceux qui l’entouraient, que, dans la position avantageuse où le plaçait l’arrivée des renforts commandés par Soupire, l’occasion d’attaquer le fort Saint-David était des plus tentantes. Mais d’autres considérations assiégèrent en même temps son esprit. Il ne pouvait oublier que le fort Saint-David avait victorieusement résisté aux attaques de Dupleix, et que les échecs qu’il y avait subis avaient servi d’encouragement aux Anglais pour atteindre graduellement à une situation au moins égale dans le Carnate. Il n’était pas non plus sans se laisser influencer par la réputation dont Lally était précédé ; on le dépeignait comme hautain, impérieux et fort prévenu contre tous les Franco-Indiens. Il ne pouvait prévoir que Lally serait près d’un an en route ; il ne savait même pas qu’il fût retourné à terre ; il croyait, au contraire, qu’il avait quitté la France