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DÉFECTION DE D’ACHÉ

l’état de maladie de ses troupes, obstacles qui ne subsisteraient pas moins dans la croisière de Ceylan. Impuissant à ébranler cette fâcheuse résolution, Lally, rejoint par le détachement d’Estaing, retourna à Pondichéry, y lit une entrée triomphale et assista au Te Deum célébré pour la prise du fort Saint-David. Toutefois, son esprit pratique ne lui laissa pas perdre de temps en vaines réjouissances : il convoqua un conseil, auquel il invita d’Aché. Il fit encore une fois valoir les raisons qui le pressaient d’agir immédiatement contre Madras, mais ses arguments se brisèrent contre la résistance opiniâtre et le refus obstiné de son collègue. Ce fut pour lui une rude épreuve que de se voir ainsi enlever les fruits de sa victoire par la stupidité d’un homme dont l’indécision et les retards lui avaient déjà été si préjudiciables, et qui se trouvait être le seul officier sur lequel il n’exerçât aucune autorité ; mais quelque rude qu’elle fut, il fallut la subir, et voir la flotte qui aurait dû le porter en triomphe à Madras, quitter les eaux de Pondichéry et emmener, pour une croisière incertaine et infructueuse, les six cents hommes qu’il avait prêtés à son amiral.

Cependant, malgré le refus de concours de d’Aché, Lally ne voulut en aucune façon renoncer à ses desseins sur Madras. Avec son coup d’œil vraiment militaire, il voyait, comme La Bourdonnais l’avait vu avant lui, que c’était là qu’il fallait porterie coup décisif. Mais il n’avait aucune aide à espérer, et point d’argent pour équiper des troupes ; Leyrit et ses collègues persistaient à soutenir qu’il leur était impossible d’en lever. Le supérieur des Jésuites, le Père Lavaur, fort influent parmi les résidents, proposa un expédient pour sortir de ce dilemme. Parmi les prisonniers de Saint-David, se trouvait ce même Sahodgi, l’ex-roi de Tanjore, que nous avons vu renverser deux fois en 1739. Rétabli en 1749 par les Anglais, dans un but d’intérêt personnel, il s’était vu détrôner de nouveau par eux quand il ne leur avait plus été utile, et depuis cette époque il était leur pensionnaire[1]. L’arrivée de Sahodgi à Pondichéry suggéra au Jésuite la pensée qu’on pourrait se servir de lui pour épouvanter son neveu le rajah de Tanjore, afin d’en extorquer le

  1. Chapitres III et VI