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DERNIÈRE LUTTE

de semblables circonstances, il semble qu’il eût été politique pour Lally d’attendre, d’éviter un engagement, d’entraver les communications des Anglais afin de les mettre dans une position désavantageuse pour combattre, s’ils y étaient déterminés. Telle était l’opinion de Bussy. Mais Lally se trouvait dans une situation où il ne pouvait plus guère agir selon les lois de la guerre. L’absence des troupes envoyées à Seringham l’avait forcé à être témoin impassible de la prise de Carangoly et de Wandewash par les Anglais. Cette inaction avait naturellement produit un mauvais effet sur ses soldats, et pour agir autrement, il aurait fallu des approvisionnements et des fonds ; il n’avait ni les uns ni les autres. Il lui parut absolument indispensable d’agir avec décision et vigueur ; aussi, le 10 janvier, dès que Crillon fut de retour de Seringham, Lally, feignant un mouvement de retraite sur Pondichéry, divisa son armée en deux colonnes. Il se plaça à la tête de l’une d’elles, et ayant, pendant la nuit, changé sa direction, il traversa le Palaur et marcha rapidement vers Conjeveram, sans s’arrêter à la Pagode ; il pilla la ville, s’empara de deux mille jeunes bœufs et d’autres provisions, puis ayant rejoint l’autre colonne qui s’était avancée pour le soutenir, il se dirigea le lendemain vers Tripatore. Ayant, par ce mouvement, attiré à Conjeveram le colonel Coote avec une portion de son armée, et obtenu des provisions pour ses hommes, il partit, le 14, à la tête de six cents Européens et de quelques troupes indigènes, pour reprendre Wandewash ; le gros de l’armée était resté à Tripatore sous Bussy.

Le fort de Wandewash était entouré de la ville du même nom, et celle-ci était protégée par un mur flanqué de petites tours et entouré d’une haie dont une grande partie était encore défendue par un fossé. Le plan de Lally était de surprendre et d’enlever la ville, puis de placer dans les rues étroites, à une petite distance du fort, une batterie qui y ferait une brèche et en faciliterait la prise, avant que les Anglais, qu’il avait détournés sur Conjeveram, pussent être revenus. Ce plan hardi était bien conçu et praticable ; mais il exigeait, dans son exécution, beaucoup de célérité et d’audace. Nous allons voir que ces deux conditions firent défaut.