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COUP D’ŒIL SUR LES CARACTÈRES

rares exceptions, la Compagnie n’eut que ses seuls vaisseaux pour défendre ses possessions. Tandis que l’Angleterre, agissant de concert avec sa Compagnie, comprenait que les intérêts de son empire exigeaient son souverain concours, la France de Louis XV, dans toute la période dont nous nous sommes occupé, ne s’éleva qu’une seule fois au niveau nécessaire pour considérer l’Inde à son vrai point de vue, et alors, ainsi que nous l’avons dit, sa politique irrésolue et sans suite fit avorter l’entreprise. Mais quoique ceci ait été la principale cause de la chute de l’Inde française, le caractère des agents qui y furent employés concourut puissamment aussi à la catastrophe. Nous confessons qu’avant d’avoir étudié sérieusement les documents officiels qui sont la base de cette histoire, nous ne pouvions comprendre comment des caractères aussi brillants, aussi énergiques, aussi entreprenants que ceux de Dupleix, La Bourdonnais, Bussy et Lally avaient pu échouer en face d’adversaires qui, sauf Clive, leur étaient inférieurs en capacité. Mais, après examen, la solution du problème est devenue facile. Ces quatre hommes célèbres ont brillé d’un éclat d’autant plus grand, qu’ils n’ont été le plus souvent entourés que de satellites désordonnés. Ce sont eux, ou plutôt, car il s’élève bien au-dessus des autres, c’est Dupleix qui projette l’éclat de son grand nom sur tout ce que ses compatriotes ont tenté en vue de créer l’empire français dans l’Inde. Il fit tout, et ne fut secondé par personne, si ce n’est par Bussy. Ce fut lui qui fit pénétrer la renommée de la nation française jusque dans les palais de Delhi, et qui conçut une politique dont ses rivaux s’emparèrent pour la suivre. Il ne réussit pas, parce que, dans sa patrie, il ne trouva pas d’appui, et que, dans l’Inde, il fut seul au milieu de ses compatriotes. Les combats livrés pour la possession de Trichinopoly montrent que ses soldats ne voulaient pas, même dans les circonstances les plus favorables, gagner des batailles. Il pouvait tout, excepté leur communiquer son esprit. Dans toutes les choses importantes, il était seul.

Si, d’un autre côté, nous examinons la conduite des Anglais, nous y trouverons de nombreux exemples du caractère persévérant de cette nation. À part Clive, qui ne parut que peu de temps sur la scène, il n’y eut pas, dans les établissements anglais, un homme