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FRANÇOIS DUPLEIX

et le lancer sans retuur dans la vie pratique, le vieux fermier-général envoya sur mer le jeune pensi’ur de dix-sept ans. Le résultat répondit entièrement à ses espérances ; au retour de l’Atlantique et des mers de l’Inde, Dupleix était guéri de son amour pour les sciences abstraites, impatient de se mêler au monde et de mettre en pratique les théories que son voyage lui avait inspirées en fait d’entreprises commerciales. Il était au pouvoir de son père de favoriser l’accomplissement de ses projets. Directeur de la Compagnie des Indes et jouissant d’une grande influence parmi ses collègues, il fit sans peine nommer son fils, qui n’avait alors que vingt-trois ans, à la seconde position de Pondichéry, c’est-à-dire au poste de premier conseiller et de commissaire militaire du Conseil supérieur. Dupleix prit possession de ses fonctions en 1720, et s’occupa aussitôt de donner un corps à ses pensées. Les colons étaient exclusivement préoccupés des relations commerciales entre l’Europe et Pondichéry ; il se proposa de développer et d’étendre le trafic des nombreux ports du littoral avec les grandes villes de l’intérieur. Ne se contentant pas de voir Pondichéry se livrer à l’exportation des produits de ses propres manufactures et de celle de ses voisins immédiats, il voulut en faire le port de transit du commerce de l’Inde méridionale. Le gouvernement de Pondichéry n’était pas alors dans une position financière qui lui permît de se lancer sans difficultés dans cette entreprise que le gouverneur Le Noir jugeait cependant praticable et même fort désirable. Mais Dupleix ne s’arrêta pas devant cet obstacle ; au contraire, le commerce privé étant permis par la Compagnie, il fut heureux de saisir une occasion de montrer aux Européens résidant à Pondichéry et qui pour la plupart étaient des agents de la Compagnie, comment ils pourraient s’enrichir par les moyens les plus légitimes. Tout ce qui contribuerait à leur créer une position indépendante ne pouvait que les attacher aux intérêts du pays et à la prospérité de l’établissement. Il ne se fit pas scrupule de donner un exemple hardi en risquant sa fortune personnelle dans une tentative de ce genre. Les résultats furent tels qu’il les avait prévus. Il réalisa en peu de temps de grands bénéfices et l’exemple de son succès fut plus efficace pour