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ÉLÉVATION DES FRANÇAIS DANS L’INDE

entraîner ses compatriotes à marcher sur ses traces que n’aurait pu l’être l’exposé de toutes ses théories.

Depuis la formation de la Compagnie perpétuelle des Indes, le contrôle des Directeurs de Paris sur leurs agents à Pondichéry était devenu beaucoup plus absolu et plus direct qu’il ne l’était antérieurement à 1720. Ils entraient dans des détails sur lesquels l’administration de la Compagnie ne pouvait être compétente ; il en résulta des ordres arbitraires, souvent mal reçus, des malentendus, puis enfin de la mésintelligence ; ce fut ainsi qu’en décembre 1726, M. Le Noir, étant gouverneur, Dupleix fut suspendu de ses fonctions, par ordre des Directeurs ; Dupleix ne voulut pas profiter du passage gratuit qui lui fut offert pour rentrer en France ; il résolut d’attendre dans l’Inde l’effet d’un mémoire qu’il s’occupa immédiatement de rédiger. Il lui fallut près de quatre années pour obtenir enfin la justice qu’il sollicitait. La sentence de suspension fut rapportée le 30 septembre 1730 et, comme compensation de l’injustice dont il avait été victime, il fut bientôt après nommé intendant ou directeur de Chandernagor, poste retiré à un jeune officier que Le Noir y avait placé.

Depuis l’époque de sa première occupation en 1676, jusqu’à celle où Dupleix en devint l’intendant, Chandernagor n’avait été considéré que comme un établissement de très-mince importance. Ses colons, négligés par la Compagnie, manquant de ressources comme d’initiative, avaient toujours été impuissants à entreprendre de grandes affaires. Cette ville, ainsi que nous l’avons vu[1], avait été fortifiée en 1688. Des postes commerciaux dépendant de Chandernagor avaient aussi été établis à Kassim-Bazar, à Jongdia, Dacca, Balasore et Patna, mais leurs opérations n’étaient pas étendues. La longue pénurie d’argent de la Compagnie avait eu entre autres effets pernicieux celui de produire la stagnation, compagne ordinaire de la pauvreté. Les agents en étaient arrivés à regarder cette stagnation comme un état de choses normal et avaient ainsi perdu l’énergie, l’initiative et toute idée d’avenir. Leurs efforts se bornaient à faire face à une circonstance difficile,

  1. Chapitre premier.