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ÉLÉVATION DU POUVOIR FRANÇAIS DANS L’INDE

deux vaisseaux de guerre, la conquête de Karical était aisée ; sans doute, la tentation eût été grande pour un homme moins circonspect, mais la première des qualités de Dumas était la prudence. Il ne voulut pas risquer, même pour une si belle proie, de perdre la réputation que les Français s’étaient acquise d’être une nation non agressive. Convaincu qu’il avait fait un grand pas en obtenant du rajah de Tanjore la cession légale de Karical et de ses dépendances, il aima mieux attendre une occasion qu’il jugeait devoir se présenter d’elle-même, dans un avenir plus ou moins rapproché, et rappela les vaisseaux à Pondichéry.

L’occasion désirée ne tarda pas à se produire : Chunda-Sahib, n’eut pas plutôt appris que Rajah-Saliodgi avait refusé de remplir son engagement à l’égard de Karical, que le prince rusé jugea le moment venu de cimenter son alliance avec les Français. Il écrivit donc à Dumas, l’informant qu’il était en guerre avec Sahodgi et lui offrant de marcher avec ses troupes sur Karical, pour la conquérir et la donner en toute souveraineté aux Français. Il ne demandait aucune aide, ne voulant, disait-il, se servir que de ses propres soldats.

Chunda-Sahib était, on se le rappelle, le gendre de Dost-Ali, nabab du Carnate et souverain féodal du territoire au Nord des possessions françaises ; lui-même, comme lieutenant de Dost-Ali, gouvernait la partie Sud-Ouest. Le Sud-Est était sous les ordres du rajah de Tanjore. Il était donc évident que la proposition faite aux Français de conquérir, à leur profit, une partie des possessions de ce rajah, ne pourrait avoir pour eux de conséquences fâcheuses, ni même les rendre suspects de projets ambitieux. C’était simplement l’ofire d’un puissant prince indien de forcer un de ses inférieurs à remplir ses engagements. Dumas ne viola donc aucun des principes de la politique de son prédécesseur en acceptant cette ofire aussitôt qu’elle lui fut faite.

Dès que Chunda-Sahib eut reçu l’autorisation d’agir, il détacha quatre mille hommes de cavalerie, commandés par un Espagnol à son service, nommé Francisco Pereira, homme sincèrement attaché aux intérêts français à Karical. Les forces de Tanjore reculèrent à leur approche, et Pereira parvint sans obstacle à Kariral le 6 février 1739. Il trouva le fort de Kircan-Gurrie, situe