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ÉLÉVATION DU POUVOIR FRANÇAIS DANS L’INDE

Ali sur les desseins de son beau-frère. Il lui avait aisément persuadé qu’en sacrifiant Chunda-Sahib il obtiendrait des conditions moins onéreuses. Ce fut sur cette base que s’ouvrirent les négociations et, dans le mois d’août 1740, on signa un traité réglant que Sufder-Ali succéderait à son père comme nabab du Carnate ; qu’il payerait à des échéances convenues dix millions de roupies aux Mahrattes ; qu’il joindrait ses troupes aux leurs pour repousser Chunda-Sahib d’Arcate ; enfin que tous les princes indiens de la côte de Coromaudel seraient remis en possession des villes qu’ils occupaient avant 1736. Ces deux derniers articles furent tenus secrets, et, pour prévenir tout soupçon, les Mahrattes se retirèrent aussitôt du Carnate.

Cependant quelques bruits relatifs à ces articles secrets parvinrent jusqu’aux oreilles de Dumas qui ne manqua pas d’en faire son profit. Déjà il avait été menacé par Raghogi-Bhonsla, et il s’en était suivi entre eux une correspondance qui n’avait rien d’amical. On lui avait demandé de payer un tribut, et il avait refusé ; sommation lui avait été faite de livrer la femme et le fils de Chunda-Sahib avec leurs trésors ; sa réponse avait été que tous les Français habitant l’Inde périraient plutôt que de commettre une pareille lâcheté. Enfin, à la menace de traiter Pondichéry comme l’avait été Bassein, récemment pris par les Mahrattes sur les Portugais, il avait simplement répondu que, si Bhonsla marchait contre Pondichéry, les Français s’efiorceraient de mériter son estime par la vigueur de leur défense[1]. Une pareille correspondance fait comprendre tout l’intérêt que Dumas devait attacher à connaître les clauses secrètes du traité. La réparation des anciennes fortifications se poursuivit avec une grande activité ainsi que la construction de nouveaux ouvrages. Il forma un corps

  1. Voici quelques extraits de la correspondance échangée entre Raghogi-Bhonsla et Dumas ; de Raghogi-Bhonsla : « Quarante années se sont écoulées depuis que notre souverain vous a donné la permission de vous établir à Pondichéry, et cependant depuis que notre armée est arrivée dans ces parages, je n’ai pas reçu une seule lettre de vous. Notre souverain, persuadé que vous méritiez son amitié, que les Francais étaient des gens de parole qui ne manqueraient jamais à leurs engagements envers lui, vous a concédé un territoire étendu. Vous avez consenti à lui payer un trihut annuel, et vous ne l’avez jamais payé. Enfin, après un temps considérable, l’armée des Mahrattes s’est avancée jusque dans ces districts. Elle a battu les Musulmans, enflés d’orgueil, et les