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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/220

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de catastrophes : incendie, noyade, guet-apens, où l’on se voit jouant un rôle héroïque. On se croit capable de sauver la bien-aimée des plus grands dangers. On se découvre l’invincible force de Samson… Mais, un jour, arrive l’accident de l’existence courante, beaucoup plus simple que nos imaginations dramatiques ; nous nous élançons, certains du succès, pour défendre celle que nous aimons… Et voici que, devant l’obstacle infime qui se dresse sur sa route, Samson s’aperçoit tout à coup que la Réalité lui a coupé ses cheveux.

— Vous êtes jeune !

J’ai à peine prononcé cette phrase que je me rappelle… Un jour, — il y a bien longtemps, — elle me fut dite textuellement par le premier homme que j’aimai, par Jean Claudières, cinglant mon enthousiasme juvénile d’alors… Aujourd’hui — comme c’est drôle ! — c’est moi qui la laisse tomber à mon tour, sur le même ton désabusé. La vie est une grande route où s’échelonnent les âges de l’homme : à chaque étape, nous retrouvons les relais de nos aînés ; et c’est à ce moment seulement que nous comprenons ce qu’ils étaient. Moi, j’ai rattrapé déjà les distances sans avoir atteint