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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/221

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leurs années : j’ai dû courir plus vite…

— Quelquefois, continue Julien, ma folle cervelle d’auteur échafaude une tragédie… Vous êtes attaquée devant moi par un ennemi, un jaloux dont le revolver se braque sur votre poitrine ; je me vois me jetant entre vous et l’agresseur ; je sens, presque réelle, l’atroce et divine sensation de la balle qui me frappe comme un coup de fouet et traverse mes chairs brûlées en déchirant les muscles… Je crois mourir pour vous. Alors… je me réveille, et je suis navré de constater que « cela n’est pas arrivé »…

— Mais c’est du sadisme sentimental, ça, mon cher…

— Nicole, je vous parle tout bêtement avec mon cœur, et c’est votre esprit qui me répond.

— Mon esprit fait la grimace les jours de migraine, et j’ai mal à la tête, ce soir.

— C’est vrai, vous êtes pâle.

Julien se penche sur moi sous prétexte d’examiner le cerne de mes yeux ; ses prunelles luisent, sa bouche tremble ; son visage est trop près du mien ; ses narines vibrantes m’envoient un souffle chaud qui me déplaît ; ses mains insidieuses descendent le long de