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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/351

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Nous voici rentrés à l’hôtel, après cette soirée peu divertissante. Paul, qui m’a raccompagnée, s’est jeté sur un fauteuil, dans ma chambre, et lutte contre l’engourdissement causé par trois heures de plaisir maussade.

— À quoi penses-tu, Nicole ?

Paul m’interroge, en sentant mes yeux braqués sur lui. Je dis lentement :

— Je songe à une nuit analogue, voilà huit mois environ, où, sommeillant au fond de ce même fauteuil, tu attendais mon arrivée… Le soir où tu m’appris la maladie de ta femme et votre départ pour l’Allemagne… Le décor pareil nous donne l’illusion d’avoir rêvé tout ce qui s’est passé depuis… Huit mois ! Comme c’est peu de chose dans toute une vie !… Comme c’est énorme, cependant… Le temps a l’air de couler sans incident, au fil des heures… Et puis, soudain, un seul jour fournit autant d’événements qu’une année entière ; il semble rattraper de l’existence en retard, abattre la besogne négligée par les semaines d’inertie, les bonnes semaines de trêve… Et quand, au