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Page:Martins - Des lemmings (1840).djvu/10

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Ces migrations sont probablement plus fréquentes que ne le pensait Linné ; la dernière série semble l’indiquer. Sans avoir assisté à toute la migration, nous avons vu l’armée se mettre en marche vers la mer. À Bossecop, notre point de départ (lat. 70°), les Lemmings étaient assez rares ; dans la forêt marécageuse qui sépare le village du plateau lapon, nous n’en vîmes pas un seul ; mais sur le plateau que nous traversâmes le 8 et le 9 septembre, ils étaient en quantité immense, on les voyait se réfugier sous chaque touffe de Bouleau nain. Lorsque nous descendîmes de nouveau au dessous de la limite du Bouleau blanc (Betula alba), leur nombre commença à diminuer. Ils n’étaient pas communs autour de Kautokeino (lat. 69°), quoiqu’il y eût un grand nombre de terriers. Nous n’en vîmes point entre Kautokeino et Karasuando (68°, 30′), mais autour de ce village situé sur la rive gauche du fleuve Muonio, ils étaient très-communs, quoique moins nombreux que sur le plateau lapon. Depuis Karasuando, nous descendîmes le fleuve sans en voir beaucoup aux lieux où nous abordâmes. Le 21 septembre, nous quittâmes Muonioniska (lat. 67°, 55′). En face de ce village, sur la rive gauche du Muonio, nous fîmes environ une lieue et demie dans une forêt de pins et de sapins, pour dépasser les rapides d’Ayen-Païka. Là les Lemmings étaient beaucoup plus nombreux que nous ne les avions jamais vus auparavant, quoique les lieux marécageux et les forêts ne soient pas leurs localités de prédilection. Il eût été impossible de compter tous ceux que l’on apercevait dans un même instant ; à mesure que nous avancions dans cette forêt, leur nombre augmentait continuellement. Arrivés à une clairière, nous reconnûmes distinctement, M. Bravais et moi, qu’ils couraient tous dans une même direction, parallèle au cours du fleuve. On peut dire sans exagération qu’ils étaient innombrables ; il eût été impossible de regarder autour de soi sans en apercevoir un grand nombre. C’était très-probablement la tête de la colonne, car depuis cette époque nous n’avons plus aperçu un seul Lemming ni un seul terrier, quoiqu’il nous arrivât souvent de débarquer sur les deux rives du Muonio, et qu’ils suivissent la même direction que nous.