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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/109

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GLORIANE

dans plus de parfums, offerte mais prenant, acceptant de ne pas choisir, parce que rien n’existait qui ne fût mon désir, transposant le sérail, je m’épanouissais, satisfaite, dans l’accomplissement de ma destinée. Quelqu’un m’emmena, — un saltimbanque qui, riche un soir, était venu. Parmi les gazes des jupes envolées, j’ai joué des castagnettes et dansé sur la corde, m’allumant aux yeux des foules. On m’a vue entrer dans les cages des bêtes, puis, couchée sur un lion, baigner dans sa crinière la chair de mes bras blancs, mettre ma bouche à sa gueule prise à pleines mains, et l’envelopper presque tout entier de ma chevelure, rousse aussi ! Des hommes me regardaient, penchés, les yeux chauds, la lèvre mouillée, qui s’avance, et moi, me relevant hors d’un tournoiement exaspéré de fauves, mes cheveux épars sur ma gorge battante, je souriais, toute menacée de baisers et de morsures !

« Je fus riche, je ne sais comment. Le matin, je cherchais mes pots de fard dans des tiroirs où l’on avait mis de l’or. Je passais à travers des fêtes, sous des lustres, dans des salles où de grands miroirs reflétaient parmi des musiques tout un agenouillement de multitude parée, et