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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/293

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FRÉDÉRICK

Japon ; ils se rencontraient, sans étonnement, comme s’ils s’étaient donné rendez-vous, se serraient la main avec l’air de s’être vus la veille, et, logeant dans le même hôtel, dînant à la même table, traversant la ville dans des voitures qui se suivaient en file, se montrant au théâtre dans des loges voisines, nombreux, joyeux, bruyants, ils faisaient penser à quelque élégante tribu, naguère éparse, qui s’est tout à coup rejointe pour se reposer un jour ; ou bien à un grand vol d’oiseaux venus des quatre coins du ciel, qui s’abat en tumulte sur un seul arbre de la forêt.

Aujourd’hui ils étaient à Oberammergau, à cause du Jeu de la Passion ; où seraient-ils demain ? Ils ne le savaient peut-être pas.

On reconnaissait parmi eux des magnats, assez semblables par l’uniforme aux hussards des parades foraines, qui jouaient de la flûte presque aussi bien qu’un musicien de bal public, et des pianistes plus décorés que des généraux, qui portaient l’habit noir avec une distinction de diplomate ; de grandes dames quelque peu déclassées, se tenant assez mal, dont on voyait rarement les maris, et des comédiennes célèbres, se tenant bien, dont on ne voyait jamais les amants ; des