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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/78

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LE ROI VIERGE

lourdes du chignon fauve et les frisons bistrés de la nuque.

Il remarqua encore que les gens s’écartaient d’elle. Plus personne sur un seuil où tout à l’heure bavardaient trois commères ; il y avait de brusques bruits de volets clos ; une vieille, sordide, au menton gris de barbe, s’élança sur un petit garçon qui jouait au milieu de la rue et l’emporta en courant ; une servante, de la fenêtre d’un second étage, répandit devant la passante le contenu puant d’un panier d’ordures, avec l’air de le faire exprès.

La grande femme continuait son chemin, sans hâte ; seulement elle tourna un peu le cou en levant la tête vers la servante ; Brascassou vit qu’elle avait toujours dans l’œil un regard de défi et le pli du mépris aux lèvres.

Dans la ville effarée et morne autour d’elle, elle était comme une reine qui traverserait sa capitale le lendemain d’un massacre, haïe et triomphante.

Elle s’engagea dans une ruelle peu large, entre de hautes murailles. Point de portes, point de fenêtres : un couloir très prolongé sous une étroite bande de ciel. Elle marcha plus vite. Elle se