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UN DÉJEUNER À L’HÔTEL DE VILLE.

cepté le pouvoir que pour s’en démettre avec éclat, comme Caton n’assistait aux spectacles publics que pour se retirer avec bruit au moment où les spectateurs criaient : « Que les acteurs se déshabillent ! » M. Rossel ne pouvant sauver la Commune ou ne le voulant pas, a voulu se sauver lui-même en la perdant. Il y a là quelque chose qui blesse la conscience. Oh ! remarquez bien que je ne crois pas le moins du monde à M. Rossel acheté par M. Thiers ; ces histoires de sommes offertes aux membres de la Commune sont des contes à dormir debout. Vous savez ce qu’on a dit de Cluseret ? Il avait l’habitude de déjeuner au café d’Orsay et d’y jouer aux dominos. Un jour son adversaire lui dit : « Voulez-vous livrer le fort de Montrouge aux Versaillais ? je vous donnerai deux millions. » À qui fera-t-on croire de pareilles billevesées ? Donc Rossel ne s’est pas vendu, et cela par l’excellente raison que personne n’a songé à l’acheter. C’est de son propre mouvement qu’il a fait ce qu’il a fait. Pour le plaisir d’être insolent et de paraître hardi il a brûlé ce qu’il avait adoré ; de sorte que, maintenant, le plus coupable des membres de la Commune, ancien escroc et pillard récent, peut dire à M. Rossel, qui est, à ce qu’on assure, un homme d’intelligence et de cœur : « Tu vaux moins que moi, car tu m’as trahi ! »

LXXIX.

Quelqu’un a vu et entendu ceci :


Dans un petit cabinet de l’Hôtel de Ville, cinq per-