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Page:Mendès - Les Oiseaux bleus, 1888.djvu/254

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LES TROIS SEMEURS

le sillon que j’ai creusé. Foi de bonne fée, ce vilain champ, plus fécond qu’il n’en a l’air, vous rendra au centuple tout ce que vous lui aurez donné.

Vous pensez si les voyageurs furent charmés de voir une aussi belle personne et d’entendre d’aussi obligeantes paroles ; mais, en même temps, ils se trouvaient bien embarrassés, étant pauvres au point qu’ils n’avaient rien du tout à semer dans le féerique sillon.

— Hélas ! madame, dit Honorat (après avoir pris conseil de Chrysor et d’Aloys), nous ne possédons aucune chose que nous souhaiterions nous voir rendue au centuple, sinon nos rêves, qui ne germeraient pas.

— Qu’en savez-vous ? reprit-elle en écartant, d’un remuement de cheveux, un papillon qui lui frôlait l’oreille (et il avait cette excuse que c’était un œillet, cette oreille), qu’en savez-vous, enfants étourdis ? Semez vos songes dans la terre ouverte, nous verrons bien ce qui poussera.

Alors Honorat, agenouillé, et la bouche vers le sillon, commença de conter ses chi-