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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome I, 1782.djvu/199

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Ils savent tirer un parti abondant du service, tandis que les provinciaux, les novices mal-adroits, n’ont pas l’esprit de faire bonne chere ; car c’est un art que de savoir goûter de tous les plats, à l’aide de quelques signes. Le soir ils se rendent chez une vieille dévote, chez un goutteux, un bénéficier ; ils y font collation, & n’ont qu’à changer un peu de langage, selon l’esprit des personnages, & répéter les nouvelles qu’ils ont apprises le matin. Ainsi, sans rentes, sans emploi, sans patrimoine, avec un habit dû encore au tailleur, & payant de mois en mois un loyer modique, ils trouvent de quoi vivre, & vivre en assez bonne compagnie. Une aptitude à retenir les noms des personnes, quelqu’usage du monde, beaucoup de souplesse dans les manieres leur suffit pour entretenir la conversation ; & l’on ne diroit jamais, à les voir le front épanoui, le visage tranquille, qu’ils n’auroient pas dîné, sans la généreuse complaisance de leur hôte. Je les compare aux oiseaux du ciel, qui prennent leur part de la