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Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/297

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qui n’avaient rien son pauvre magasin, quand elle entendait des pas qui lui rappelaient ceux de son mari, et le chien dressait les oreilles.

Nous avons dit que le chiffre de trente-cinq mille adopté officiellement pour les victimes de la répression de Versailles ne peut être pris comme réel.

La lettre de Benjamin Raspail à Camille Pelletan, en contient d’indiscutables preuves que nombre d’autres depuis sont venues corroborer.

« Mon cher ami,

» On aura beau faire pour établir le chiffre des morts pendant la tuerie qui a suivi la répression de la Commune, on n’arrivera jamais à en savoir le nombre.

» D’après votre article, paru samedi dans la Justice, vous dites qu’il faut évaluer à plus de trois mille cinq cents, les corps enterrés au cimetière d’Ivry.

» Je puis vous garantir que vous êtes singulièrement loin du compte.

En effet, rien que dans l’immense fosse creusée dans ce qu’on appelle le premier cimetière parisien d’Ivry, il y fut enfoui plus de quinze mille corps.

» En outre on fit plusieurs autres fosses, et l’on estimait qu’elles contenaient six mille autres cadavres, soit en tout vingt-trois mille.

» À l’époque je ne tardai pas à être bien renseigné, et les agents de la police qui pendant plusieurs années firent le service pour empêcher les parents et les amis de placer la moindre marque de souvenir sur cette immense fosse, ont toujours dit le premier chiffre lorsqu’on les interrogeait.

» Je puis même ajouter que certains d’entre eux ne cachaient pas combien l’exécution de leur consigne vis-à-vis des parents leur était pénible.

» Le chiffre de quinze mille dans la grande fosse, n’a jamais été mis en doute.