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Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/306

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Nous avions crié : ce n’est pas Mégy, il secoua la tête comme pour dire : qu’importe ! Il fut fusillé sur le tertre et mourut bravement. Personne de nous ne le connaissait.

Nous attendions nos tours.

Devant nous un ou deux rangs de soldats, fusils chargés, attendaient.

Le soir était venu ; il y avait de profonds endroits d’ombre, d’autres éclairés de lanternes. Dans un enfoncement sur une civière, une de ces lanternes éclairait le corps du fusillé.

Il y avait parmi les prisonniers deux commerçants de Montmartre qui, sortis de chez eux par curiosité pour voir, avaient été ramassés dans la rafle. — Nous ne sommes pas en peine pour nous, disaient-ils, nous étions plutôt contre la Commune et nous n’avons pris part à rien. — Nous allons nous expliquer et nous sortirons d’ici. Mais nous les sentions tout autant en danger que nous-mêmes.

Tout à coup arrive un état-major à cheval. — Celui qui commande est un homme assez gros, au visage régulier, mais dont les yeux pleins de fureur, semblent jaillir au dehors. La face est pourpre comme si le sang répandu y eût jailli pour le marquer, son cheval magnifique se tient immobile, on le dirait en bronze.

Alors, très droit sur son cheval, il met ses poings sur ses côtés en un geste de défi et commence, placé devant les prisonniers :

— C’est moi qui suis Gallifet ! Vous me croyez bien cruel, gens de Montmartre, je le suis plus encore que vous ne pensez.

Il continue sur ce ton pendant quelques instants sans qu’il soit possible de comprendre autre chose que des menaces incohérentes.

Se le tenant pour dit, on s’arrange comme on peut afin d’être convenables pour mourir. Nous sommes